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Des centaines de postiers du STTP de l’est du pays se sont réunis sous la pluie glaciale au siège social de Postes Canada mercredi. Les postiers sont descendus en une masse solidaire en face des bureaux de leur employeur à Ottawa afin de réaffirmer qu’ils ne se laisseront pas « bafouer » et « insulter » aux tables de négociations.
En effet, selon Guillaume Brodeur, un facteur du bureau de poste de Chabanel à Montréal, la dernière offre syndicale était « une offre de compromis » qui a été « rejetée du revers de la main » par le patronat en début de semaine.
Selon M. Brodeur, le blocage se fait dans les coulisses parlementaires et il s’inquiète que l’employeur n’avait jamais l’intention de négocier une entente: « Personnellement, ma crainte, rendu aussi loin dans le conflit, c’est que je me demande si le gouvernement n’est pas hypocrite depuis le début. »
« C’est le gouvernement qui possède Postes Canada. Si dans les coulisses, ils leur mettaient de la pression pour régler, ça pourrait se régler demain. Ça fait que les beaux discours de Duclos et MacKinnon, qui disent qu’ils veulent une entente négociée, je suis d’accord avec ça! Mais je me demande si ce n’est pas sur notre dos ».
L'épée de Damoclès de la loi spéciale
De nombreux facteurs et factrices, comme Isabelle, de Saint-Félicien, rêvaient à la possibilité qu’une loi spéciale soit imposée dans l’intérêt des travailleurs et du peuple canadien et non pas de l’employeur. « Ça serait bien qu’il y ait une loi [spéciale], mais qu’elle soit pour nous autres ».
Ayant été près des tables de négociations depuis plusieurs années, Nancy, une factrice rurale, a raconté à l'Étoile du Nord qu'elle croit que le gouvernement s’est trop servi des lois spéciales. D’après elle, l’employeur s’attendait à ce que le gouvernement intervienne en leur faveur. « On est persuadé que c’est à ça que Postes Canada s’attendait ».
Nancy pense que l’objectif principal du syndicat est de négocier cette nouvelle convention collective de la bonne façon, pour que les travailleurs en sortent enfin gagnants.
Elle ajoute que la grève générale est un levier qui pourrait permettre aux postiers de se rattraper par rapport aux dernières conventions. Ces dernières ont été imposées par un arbitre choisi par le gouvernement et étaient, du même coup, fort avantageuses pour le patronat.
Cependant, elle affirme que le STTP veut également réussir à signer une entente qui va contribuer au mieux-être de la société d’État. Pour elle, toutefois, le patronat n’a pas la même conviction. « Postes Canada a l’effet tunnel et s’en va dans le mur », s'exclame-t-elle.
Toujours mobilisés pour le futur de la poste
George et Pearl ont fait 15h de route pour ramener leurs patrons à l’ordre: « Arrêtez cette folie », s'exclame Pearl! « Revenez à la table de négociations, et arrêtez d’essayer de nous enlever des acquis faits dans nos anciennes conventions collectives! ». Ils étaient plusieurs sur les lieux à s'insurger des procédés de négociation de l'employeur.
Plusieurs membres du STTP s’inquiètent que ce conflit de travail dépasse une simple lutte pour de meilleures conditions, mais qu’il soit une lutte existentielle pour une poste publique.
Tel que nous avons reporté dans les dernières semaines, de nombreux employés interviewés ont décrié le dépérissement des services et la mauvaise gestion de l’entreprise déficitaire depuis 2018. « On n’est pas juste là pour la poste, on est là pour le peuple aussi », nous confirme Isabelle. « On veut retourner travailler, mais pas à n’importe quel prix. À un moment donné, ça prend de la reconnaissance ».
Après 22 ans de carrière, elle est atterrée de voir le recul dans les services et dans les conditions de travail. Elle se joint aux nombreux manifestants, ravie d’enfin avoir le droit de lutter pour l’avenir de sa carrière et de son entreprise. Toutefois, elle craint que cette négociation soit le dernier clou dans le cercueil de Postes Canada.
« Moi, je vais durer jusqu’au bout, mais si on retourne au travail et que ce sont eux qui en sortent gagnant […] bien, je démissionne. Puis c’est dommage pour eux autres par ce qu’ils ne vont pas perdre que moi, mais plein de monde qui ont vraiment ça à cœur. C’est nous autres qui la faisons rouler l’entreprise, c’est pas eux autres. […] Ils prennent des décisions de marde. Mais c’est nous, les petits pions qui connaissent l’ouvrage, on sait, c'est quoi que ça prend. »
Dans cette quatrième semaine de grève, plusieurs travailleurs reconnaissent la nécessité de voir un déblocage. M. Brodeur s’inquiète qu’avec les coupures aux assurances maladie, les conditions météorologiques et les fêtes qui approchent, plusieurs grévistes commencent à « voir venir le cul-de-sac budgétaire », mais il rajoute que « le monde reste droit. On n’a pas le choix ».
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