L'Étoile du Nord

Journée sans migrants

« Le pouvoir des migrants est économique »

Temps de lecture:3 Minutes

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Le 18 décembre, des groupes de défense des droits des migrants du Canada et d'ailleurs ont organisé des manifestations, des arrêts de travail et des conférences de presse pour protester contre des conditions juridiques et de travail hostiles. Ces actions coïncidaient avec la Journée internationale des migrants.

À Montréal, des dizaines de migrants et de militants se sont rassemblés devant le Complexe Guy-Favreau, qui abrite plusieurs bureaux gouvernementaux, dont la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Le thème de la journée était « Une journée sans migrants ». Les messages diffusés à cette occasion mettaient l'accent sur le rôle économique joué par les migrants, ainsi que sur la précarité de leurs conditions de vie et de travail.

La Journée sans migrants existe depuis près de 20 ans au niveau international. Mostafa Henaway, organisateur communautaire au Centre des travailleurs immigrants (CTI), explique : « Son histoire aux États-Unis a commencée avec la grève de 2006 et de 2007 des travailleurs migrants et immigrés ».

Le 1er mai 2006, des centaines de milliers de travailleurs migrants et leurs sympathisants aux États-Unis ont participé à des grèves et à des manifestations sur le thème de la « Journée sans migrants ». Ces actions s'inscrivaient dans le cadre d'un mouvement de protestation de près de deux ans contre des réformes qui prévoyaient des sanctions juridiques plus sévères pour les sans-papiers dans le pays.

Au Canada, les actions de cette année surviennent à un moment particulièrement incertain pour les immigrants. En septembre, le Parti libéral a introduit des changements dans la politique fédérale qui pourraient menacer le statut de dizaines de milliers de travailleurs étrangers temporaires. Fin octobre, le gouvernement fédéral a annoncé des réductions massives du nombre de résidences permanentes qu'il acceptera au cours des trois prochaines années.

Pour Henaway, la position capricieuse du gouvernement en matière d'immigration est une ultime tentative des libéraux pour regagner un peu de popularité auprès d'une base d'électeurs dont les conditions de vie se détériorent :

« Il y a exactement un an, [le ministre de l'immigration Marc Miller] annonçait dans le Globe and Mail la mise en place d'un programme global de régularisation de masse. Un an plus tard, il parle de la sécurité des frontières. […] Donc, toutes ces coupes ont été mises en place une fois que le Parti libéral s'est rendu compte qu'il n'était plus populaire et qu'il semblait que Trump allait gagner. »

Une lutte commune pour les Canadiens et les migrants

Amy Darwish, une organisatrice de locataires du Comité d'Action de Parc-Extension, souligne que les migrants sont particulièrement touchés par la crise du coût de la vie dont on les accuse souvent.

« En fait, les personnes sans papiers sont les plus touchées par la crise du logement », a-t-elle déclaré. Mme Darwish a cité la discrimination en matière de logement, le manque d'accès aux logements sociaux et la tendance des travailleurs sans papiers à éviter de porter plainte contre les propriétaires abusifs par crainte d'être expulsés. « À bien des égards, [les migrants] sont en première ligne de toutes ces luttes que tout le monde connaît », a-t-elle déclaré.

Henaway partage cet avis : « Lorsqu'ils se battent dans des quartiers pauvres et ouvriers comme Parc Extension pour obtenir de meilleurs logements et le droit à des logements sociaux, cela concerne tout le monde. Et ceux qui exploitent les travailleurs immigrés et migrants sont les mêmes que ceux qui profitent de l'inflation ».

M. Henaway souligne que les travailleurs canadiens et les travailleurs migrants ont de nombreuses préoccupations en commun :

« Ce pour quoi les travailleurs migrants et immigrés se battent, c'est pour l'ensemble de la classe. Ils se battent dans des endroits comme Amazon. Ils se battent contre des emplois de mauvaise qualité, avec un taux de rotation élevé et des salaires bas. C'est un problème de classe, pas un problème d'immigrés ».

M. Henaway souhaiterait une plus grande unité entre les syndicats et les défenseurs des migrants.

« Je pense qu'il faut une solidarité de base pour remettre en question le discours anti-migrants au sein du mouvement syndical. C'est notre première clé. Ensuite, il faut renforcer les organisations de travailleurs migrants et leur capacité à lutter sur le lieu de travail.

Comme les travailleurs qui ne sont ni citoyens ni résidents permanents ne peuvent pas voter, Henaway souligne que « le pouvoir des migrants est économique et que s'ils avaient le soutien des syndicats, ils pourraient essayer de l'exercer ».

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