L'Étoile du Nord

Revue de l’année

2024 en Ontario―Corruption, grèves et premiers historiques

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L'année 2024 a été une véritable bombe pour l'actualité en Ontario: des premières historiques, des records de mandats de grève, sans oublier l'ombre omniprésente de la corruption du gouvernement provincial qui plane sur les Ontariens. Alors que les travailleurs ordinaires luttaient pour se procurer de la nourriture, un logement et d'autres produits de première nécessité, Doug Ford et ses conservateurs offraient à ses amis une place de choix sur la liste des fonctionnaires les mieux payés.

L'année écoulée a mis en lumière la crise du coût de la vie dans l'ensemble du pays, en particulier en Ontario, la province la plus urbanisée et la plus peuplée du Canada. Le coût du logement considéré « abordable » par la province a atteint 70% du revenu du travailleur moyen, le reste étant largement dépensé dans les épiceries détenues par quelques géants monopolistiques. Il n'est donc pas surprenant que les travailleurs en avaient assez et qu'ils étaient prêts à se battre.

Bien que les données actuelles de Statistique Canada indiquent qu'il y a eu moins d'arrêts de travail en 2024 qu'en 2023une année record pour les actions de grèvela province a néanmoins connu plusieurs grèves importantes cette année.

Mouvements syndicaux

Le Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario (SEFPO) est entré dans l'histoire en déclenchant sa toute première grève à la Liquor Control Board of Ontario (LCBO), la chaîne de magasins de spiritueux gérée par la province. Ayant débuté le 5 juillet, la grève a rassemblé plus de 9 000 employés pour confronter les problèmes de la société d'État. La privatisation et l'enrichissement des cadres au détriment des travailleurs qui luttent pour s'en sortir ont donc été au centre des discussions de l'été. Ces thèmes ne sont pas étrangers à ceux qui sont ressortis lors de la récente grève d'une autre société d'État, celle de Postes Canada.

Un autre parallèle entre les grèves de la LCBO et de Postes Canada: les plaintes des travailleurs quant à la réduction des dépenses, aux licenciements et à la mauvaise gestion des ressources de l'État, faisant craindre une privatisation des services publics.

Dans les deux cas, les travailleurs disaient se mobiliser non seulement pour obtenir de meilleurs salaires et avantages, mais aussi pour défendre leur dignité et s'opposer aux projets néolibéraux des gouvernements et des grandes entreprises.

Une autre première historique: les travailleurs de l'entrepôt de Mississauga ont syndiqué le premier entrepôt de Walmart au Canada. Walmart est connu pour ses opérations de démantèlement des syndicats, et il a fallu neuf mois aux organisateurs d'Unifor pour arriver au stade de faire la demande d'adhésion à un syndicat.

Enfin, dans ce qui est peut-être la plus grande victoire pour les syndicats de l'Ontario en 2024, le tristement célèbre projet de loi 124 de Doug Ford a été jugé inconstitutionnel par la plus haute cour de justice de la province. Le projet de loi 124 visait à éviter de négocier avec les employés du secteur public en limitant leurs augmentations salariales à 1% par an pendant trois ans.

Corruption au gouvernement

Ce fut une bonne année pour être chum avec le premier ministre Ford: les oligarques de l'épicerie peuvent maintenant vendre de la bière, du vin et des coolers, il a coupé court aux démarches administratives pour les promoteurs immobiliers et a accordé des subventions à tous les grands partis politiques à partir des fonds publics.

Avoir des relations avec le gouvernement de Ford est tellement lucratif que l'auditeur général et la GRC l'ont remarqué et ont ouvert une enquête criminelle sur le scandale de la Greenbelt.

Les conservateurs ne sont pas les seuls à avoir trouvé des moyens de se faire un peu d'argent à Queen's Park: d'autres députés se partagent également une belle part du gâteau. Alors que les Canadiens sont confrontés à la montée en flèche du coût du logement, la majorité des députés de l'Ontario sont des propriétaires de logement locatif qui profitent des loyers élevés et de l'augmentation de la valeur des propriétés.

La crise du logement

Alors que les fonctionnaires et leurs proches profitaient de la crise du logement, les Ontariens ont été obligés de se rendre compte des niveaux de corruption, de misère et de financiarisation qui existent dans le marché locatif.

Au cours de l'année écoulée, des locataires partout dans la province se sont mobilisés pour lutter contre les propriétaires corporatifs et les fiducies immobilières financiarisées.

L'East Scarborough Tenants Union (ESTU) a remporté deux victoires importantes contre MetCap et Starlight Investments; l'une contre l'expulsion d'une mère célibataire dont MetCap n'acceptait pas les paiements de loyer, et l'autre contre deux propositions d'augmentations de loyer supérieures aux normes.

Toujours dans la région du Grand Toronto, les résidents de trois immeubles de Thornecliffe Park ont célébré un an de grève des loyers ininterrompue, également contre Starlight Investments. Les locataires de York South-Weston sont également entrés en grève contre leurs propriétaires, Dream Unlimited et Barney River Investments.

En octobre, des locataires de Kitchener-Waterloo-Cambridge, Guelph, Toronto, Lindsay et Hamilton ont fait le lien avec un rénovicteur véreux et notoire, Michael Klein. Klein est le plus grand rénovicteur de l'Ontario, lié par l'intermédiaire de différentes sociétés à 21 immeubles qui ont fait l'objet d'expulsions massives sans égard à la faute.

Droits et libertés bafoués

Au cours de l'année écoulée, les décisions des riches et des puissants n'ont pas seulement eu un impact sur leurs employés ou leurs locataires: elles ont eu un impact sur des communautés entières, bien que ces effets soient peu couverts par les médias grand public.

En avril, la Première nation Aamjiwnaang a déclaré l'état d'urgence à la suite de l'empoisonnement simultané de plusieurs résidents par la contamination au benzène de l'usine INEOS Styrolution située à proximité. Au lieu de respecter les règles de surveillance du benzène introduites par le gouvernement pour protéger les communautés locales, INEOS a choisi de fermer définitivement l'usine d'ici 2026. Quatre-vingts travailleurs ont été mis au chômage et 500 emplois de sous-traitants ont été supprimés, tout en laissant une installation de traitement chimique inactive au-dessus des Premières Nations locales.

Au cours de l'année, de nombreux problèmes auxquels sont confrontés les Ontariens ont été entièrement attribués aux immigrants ou aux étudiants internationaux, évitant ainsi un débat approfondi sur ces questions. Dans ce contexte, les étudiants internationaux de Brampton sont descendus dans la rue en septembre pour protester contre les changements de lois qui pourraient conduire à leur expulsion.

Une année de lutte

Dans l'ensemble, les Ontariens ont passé l'année à lutter contre des entreprises avides, un marché immobilier qui continue de profiter aux riches et des politiciens à la crédibilité limitée qui vendent la province pour leur propre bénéfice et celui de leurs amis. Ces premières historiques dans l'histoire syndicale ontarienne pourraient-ils être le point de départ d'un mouvement syndical explosif en 2025? D'autres locataires suivront-ils l'exemple donné par l'ESTU et les résidents de Thornecliffe Park? Ce qui est certain, c'est que l'Étoile du Nord sera sur le terrain dans la province la plus peuplée du Canada pour rapporter ces nouvelles.

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