L'Étoile du Nord

Amazon VS les syndicats

Amazon renvoie une trentaine de travailleurs à Laval, le syndicat s’insurge

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Amazon a mis à la porte une trentaine de travailleurs de son entrepôt à Laval il y a quelques jours. La multinationale affirme avoir mis fin à des contrats saisonniers, mais le syndicat rétorque qu’il s’agit en réalité de travailleurs embauchés il y a plus de six mois. Hier après-midi, le Syndicat des travailleuses et travailleurs d’Amazon Laval–CSN (STTAL) a déployé une bannière au-dessus de l'Autoroute 15 sur laquelle on pouvait lire: « Amazon méprise ses employés ».

En entrevue avec l'Étoile du Nord, Félix Trudeau, le président du STTAL, explique que « ce sont des travailleurs qui étaient à l'entrepôt depuis un certain temps. Ils se sont fait dire par Amazon qu'ils ne travailleraient plus à l'entrepôt seulement quelques jours avant qu'ils soient renvoyés. Donc, ils ont été jetés à la rue. »

Dans les médias, la porte-parole d'Amazon, Barbara Agrait, affirmait que « ces personnes ont été embauchées en tant qu’employés saisonniers dont les contrats stipulaient des dates de fin claires. » 

Pourtant, peu de saisons durent aussi longtemps que l'emploi de Chirag Rhati, un des travailleurs renvoyés, qui travaillait chez Amazon depuis huit mois. Il dément la déclaration d'Amazon: « J'ai été embauché en avril, et je ne pense pas qu'il y ait de fêtes ou d'occasions majeures à ce moment-là de l'année. »

« Au Canada, en cette période hivernale, c'est difficile de trouver un emploi et y'a des factures à payer. C'est comme ça qu'Amazon traite ses employés qui travaillent dur »​, s'exclame-t-il.

« Ils ne suivent pas l'ordre d'ancienneté », ajoute Denis Letourneux, travailleur de l'entrepôt DXT4. « On est au courant qu'après la saison des fêtes, il y a effectivement des personnes qui ne seront pas réengagées. Mais il faut suivre l'ancienneté quand même. » 

Au contraire, M. Rhati est convaincu que les renvois n'ont pas été faits au hasard. « Ils nous ont mis dehors parce qu'ils veulent que nous servions d'exemple aux nouveaux venus: 'si vous faites partie du syndicat, on devra vous renvoyer, parce qu'on pense que vous ne valez rien'. »

Selon le syndicat, les travailleurs ayant été engagés pour un contrat saisonnier de trois mois avant la période des fêtes n'ont pas été congédiés. 

Le modèle d'embauche d'Amazon dénoncé

Pour être embauché chez Amazon, il faut absolument passer par un contrat saisonnier. Ces contrats, bien que plus fréquents à l'approche des fêtes, sont attribués tout au long de l'année, peu importe la saison.

Le syndicat dénonce l'absence totale de critères pour obtenir la permanence, laissant les travailleurs dans l'attente et l'incertitude. Il est d'ailleurs commun que des travailleurs voient leur contrat renouvelé plusieurs fois, à coup de 30 jours ou de trois mois. Certains finissent par travailler plus d'un an sans permanence, et donc sans accès aux avantages sociaux.

« On veut se débarrasser de ce système-là », martèle M. Trudeau. « Ce qu'on veut, c'est des emplois permanents, comme n'importe quel autre job au Québec. Là, en ce moment, c'est le Far West, et on n'acceptera pas ça. »

Félix Trudeau, en avant plan

Il constate qu'Amazon voudrait « revenir au 19e siècle. Ce qu'ils veulent, c'est le système où le contremaître arrive le matin, et où il choisit qui il veut et renvoi le reste chez eux. ​​​​​Cette façon-là de contrôler le nombre d'employés, de renvoyer le monde, ça fait partie de la stratégie d'Amazon de garder ses travailleurs précaires pour qu'ils soient plus faciles à exploiter. »

« Ce qu'ils font, c'est qu'ils mettent les gens dans l'incertitude et les forcent à se demander constamment: "Est-ce que je vais travailler le mois prochain? Est-ce que je vais travailler la semaine prochaine?" Donc il y a bien des gens qui se sentent pressés de travailler plus vite à cause de ça. »

« En plus, si tu gardes les travailleurs dans un statut saisonnier et qu'ensuite tu les renvoies, même pas besoin de leur payer des assurances. Ils se sont tués à la job pendant 8 mois, ils se sont brisé le dos, et tu n'as même plus besoin de payer la CNESST. Ils les jettent comme des ordures. Mais c'est les travailleurs d'Amazon qui lèvent les boîtes, c'est pas Jeff Bezos pis sa gang. »

Chirag Rhati a mentionné à l'Étoile du Nord avoir parlé à certains de ses anciens collègues et qu'ils disent manquer de personnel suite au renvoi de la trentaine de travailleurs. « Ils nous ont mis dehors et ça ne servait à rien. Ils ont besoin de nous, mais le fait est qu'ils essaient de faire un exemple de nous, pour faire peur aux travailleurs. Ils se foutent de savoir si on est saisonniers. Ils utilisent juste la forme de contrat comme une excuse pour leurs mauvaises affaires, c'est tout. »

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