L'Étoile du Nord

PL89 pour limiter le droit de grève

Jean Boulet fait reculer le Québec 60 ans en arrière

Le 19 février, Jean Boulet, le ministre du Travail de la CAQ, a déposé le projet de loi 89 (PL89) qui attaque le droit de grève des travailleurs du Québec. L'ensemble des syndicats de la province ont dénoncé ce projet de loi qu'ils accusent de brimer le droit constitutionnel de libre association.

Avec ce projet de loi, Boulet se donne le droit de forcer le retour au travail dans des secteurs qui ne sont pas considérés comme essentiels. Éducation, secteur municipal, secteur privé—rien n'est épargné par le ministre accusé à plusieurs reprises de favoriser les intérêts du patronat.

Au Québec, l'année 2025 est déjà ponctuée par plusieurs conflits de travail, notamment dans les les CPEs, le transport scolaire et l'hôtellerie. À ces secteurs risquent de s'ajouter la construction, le transport collectif et les cols bleus dans les prochains mois.

Si le PL89 est adopté, le ministre du Travail pourrait suspendre ces grèves et imposer des arbitrages exécutoires aux tables de négociation en question. Or, ce genre de mesure a pour effet de réduire considérablement le rapport de force des syndiqués.  

Le récent conflit de travail chez Postes Canada en est un bon exemple. Depuis la suspension de leur grève par le gouvernement fédéral, les postiers sont pris dans une négociation factice où la partie patronale bloque toute avancée. 

Les négociations avec les infirmières de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) qui se sont prolongées jusqu'au printemps 2024 font aussi cas de figure. Les dispositions sur les services essentiels à maintenir en cas de grève rendent les moyens de pression dans la santé inefficace.

Dans le PL89, le ministre du Travail s'inspire de la loi sur les services essentiels. En effet, celui-ci propose d'invoquer des critères sur des services minimaux à maintenir lors de conflits de travail dans n'importe quel secteur.

Plusieurs acteurs du milieu syndical ont accusé la CAQ de vouloir prendre sa revanche contre le Tribunal administratif du travail. Le gouvernement québécois a essuyé un revers du Tribunal en 2023 lors de la grève du Réseau de transport de la Capitale.

La CAQ demandait le maintien du service d'autobus pendant le Festival d'été de Québec. Le tribunal avait alors refusé de reconnaître le service d'autobus comme essentiel et donc de suspendre la grève.

Lors de la présentation de son projet de loi, Boulet a aussi mentionné qu'il s'appliquerait au secteur de l'éducation invoquant le besoin de protéger les élèves plus vulnérables.

Selon la Fédération autonome de l'enseignement, qui représente près de 67 000 enseignants québécois, les grévistes sont injustement blâmés pour les politiques d'austérité qui résultent de l'action du gouvernement.

« Si l’on veut se préoccuper des besoins des populations les plus vulnérables, il faut se rappeler que ce qui a fait mal aux élèves du Québec, jeunes et adultes, c’est le sous-investissement chronique de l’école publique au cours des 20 dernières années. »

« Restreindre le droit de grève signifie réduire la capacité de nos membres à se faire entendre. Les moyens de pression sont très limités en éducation. Il est fondamental pour les travailleuses et travailleurs de maintenir le rapport de force entre la partie syndicale et l’État employeur. »

Pour sa part, Caroline Senneville, présidente de la CSN, accuse la CAQ de « déclarer la guerre » aux travailleurs et de s'inspirer de méthodes contestées devant les tribunaux. « Alors que les récentes interventions du ministre du Travail à Ottawa sont actuellement contestées devant les tribunaux, il est très hasardeux d’aller sur ce terrain maintenant. » 

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