L'Étoile du Nord

Austérité historique en éducation

Les travailleurs et les étudiants condamnent les coupes dans les Cégeps

Encore une fois, la CAQ impose l'austérité budgétaire à la fédération des Cégeps. Après avoir coupé dans le budget des Cégeps à quelques jours de la rentrée l'an dernier, la ministre Pascal Déry revient à la charge et impose des compressions de 150 millions pour l'année à venir. Cela représente 3 millions en moins dans les budgets respectifs des Cégeps Montmorency et Sherbrooke. La CSN et la CSQ, qui représentent les enseignants et les travailleurs des Cégeps, ont appelé à la démission de la ministre.

Cette nouvelle vague de coupures s'ajoute au gel d'embauches décrété dans l'ensemble de la fonction publique l'an dernier par le Conseil du trésor et à un resserrement draconien des budgets d'investissements et d'acquisition de matériel.

Antoine Deslauriers, professeur de philosophie au CÉGEP Saint-Laurent, explique les impacts de ces mesures. « Concrètement, ce qui se passe, c'est qu'avec les gels et les coupures notamment, lorsqu'il y a départ de quelqu'un qui n'est pas immédiatement en contact avec les étudiants, eh bien, cette personne-là ne sera pas remplacée. »

« Ce qu'on craint, c'est qu'on augmente de façon indue la pression sur les travailleurs et les travailleuses qui resteront en poste, avec évidemment des risques accrus de blessure, de burn-out et compagnie. »

Ces mesures font particulièrement mal en raison de l'état lamentable des CÉGEPS et des grands défis auxquels fait face l'enseignement supérieur. Au mois de mars, des étudiants du CÉGEP Saint-Laurent ont fait la grève pour dénoncer l'effondrement de leur campus et ces conséquences sur leur parcours scolaire.

M. Deslauriers a lui-même pu en constater les impacts. « Moi, avant d'être professeur, je travaillais au service adapté [un service d'accompagnement aux élèves en difficulté]. Je sais les difficultés qui viennent avec le manque de ressources, avec, pour ce qui concerne le cégep Saint-Laurent, la réorganisation des locaux notamment. Ça peut engendrer des difficultés et du stress, aussi bien chez les étudiants et les étudiantes que chez les travailleurs et les travailleuses. Donc ça, c'est un problème réel. »

L'annonce de la fin des bourses perspectives a aussi été très mal reçue par les étudiants. Ce programme visait à offrir un soutien financier supplémentaire aux étudiants dans des programmes ciblés pour leur manque de main-d'œuvre et qui comportent souvent des stages non rémunérés (enseignement, éducation à la petite enfance, soins infirmiers).

L'observatoire sur la réussite en enseignement supérieur, un organisme qui vise le partage de connaissances entre professeurs de l'enseignement supérieur, a dû mettre fin à ses activités au mois de mars suite à un manque de financement. Le Programme d’aide à la recherche sur l’enseignement et l’apprentissage, qui finançait la recherche éducative en milieu collégial, a, lui aussi, dû suspendre ses activités.

Selon le professeur de philosophie, la CAQ et les gouvernements qui l'ont précédé sont régulièrement attaqués à la formation générale. « Parce que la formation générale est, de leur point de vue, un frein à l'entrée sur le marché du travail pour ceux qui ne voudront pas aller au bout de l'exercice des cours de philosophie, de français, d'éducation physique et d'anglais. Donc, du point de vue des gouvernements, c'est un manque à gagner en termes de main-d'œuvre. »

La CAQ justifie ses coupes dans le système d'éducation à l'aide de son dernier budget qui présenterait un « déficit historique » à combler. Or, l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS) a démenti cette campagne de peur dans son étude du budget en mars dernier. Selon les calculs de l'IRIS, le déficit est sous contrôle, même qu'il représente une moins grande part du PIB que lors de budgets précédents.

Une contre-attaque syndicale est prévue par plusieurs syndicats, notamment au CÉGEP Saint-Laurent où ceux-ci sont organisés en alliance intersyndicale. « Il y a un travail important qui se fait au Cégep de Saint-Laurent depuis quelques sessions déjà, depuis notamment le dernier front commun, pour mettre de l'avant les conséquences parfois dramatiques que ces coupures-là vont avoir sur un certain nombre de travailleurs du Cégep. Je pense tout particulièrement aux travailleurs et travailleuses du secteur du soutien et des professionnels. » 

En plus de ces nouvelles mesures d'austérité, la ministre Déry a gagné en impopularité en raison de son ingérence dans le contenu de certains cours dans les CÉGEPS. Elle s'est imposée dans certains programmes aux CÉGEPS Dawson et Vanier pour interdire toute critique de l'État d'Israël et toute mention du génocide en cours à Gaza.

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