L'Étoile du Nord

Métros et bus perturbés

L’entretien de la STM en grève contre le démantèlement du service

En grève depuis hier matin, les travailleurs d’entretien de la STM refusent de voir le service qu'ils donnent à la population être démantelé. Coupes de personnel, baisses de services et privatisations ont commencé il y a quelques années, mais s’accélèrent. Bruno Jeannotte, président du syndicat en grève, affirme que ses membres ne reculeront pas.

Le service d’entretien de la société de transport regroupe plus de 50 corps de métiers (électriciens, plombiers, mécaniciens, entretien ménager, etc.). La grève déclenchée lundi matin perturbera fortement les horaires du métro et des autobus. Des détails sur ces perturbations se trouvent sur le site web de la STM.

De moins bons emplois et un moins bon service

Jeannotte a expliqué à l'Étoile du Nord que la STM voudrait retirer de la convention collective des clauses qui empêchent la sous-traitance et la privatisation, de même que des clauses protégeant la sécurité d'emploi des travailleurs. « Si on abandonne ces deux points-là, ça va être critique. »

D'un côté, il y a la sécurité d'emploi. La STM doit actuellement relocaliser ses employés lors d’une fermeture de service. Jeannotte explique que la sous-traitance réduit la main-d’œuvre nécessaire, créant un surplus d’employés. Pour pouvoir les mettre à la porte plus facilement, la STM veut supprimer ces clauses de protection.

De l'autre, il y a la qualité du service. « Si on va vers la sous-traitance, on est lié au plus bas soumissionnaire. Le plus bas soumissionnaire va faire une soumission ridiculement basse, on va se débarrasser de nos équipements, puis, après ça, on va gonfler les prix, on va déborder de partout, et là, ça va coûter plus cher. »

« Finalement, on va avoir un service moins optimal. Après, c'est la population totale qui va être paralysée. Ça, c'est pas mal plus dommageable que quelques jours de grève avec un service interrompu. »

Inquiets pour le transport adapté

« C'est déjà arrivé au début des années 2000, on avait sous-traité une partie de l'entretien des autobus. Après quelques mois, la SAAQ est venue immobiliser le tiers de la flotte pour des enjeux de sécurité. C'est 500 autobus sur 1500 qui ont arrêté de bouger du jour au lendemain. »

C'est pour ça qu'ils s'opposent autant à la privatisation du transport adapté, annoncée en février. « À partir du moment où il n'y a pas d'argent à faire, on va négliger l'entretien des véhicules. »

Il donne l'exemple des rampes pour fauteuil roulant, qui peuvent briser facilement. Si elles ne fonctionnent plus, les usagers du transport adapté devront utiliser des taxis, plus coûteux et inadaptés à leur condition. « Rien à voir avec la qualité de service que nous, on pouvait donner. »

Source : MtlFlexTV page X/Twitter

Lors de l'annonce, la STM s'est justifiée en utilisant des termes comme « uniformisation du service », « innover », « améliorer l'offre » ou « revoir le modèle d'affaire ». Mais dans le dernier paragraphe du communiqué de presse, la STM n'a pas laissé beaucoup de doute quant aux raisons de cette privatisation :

« Cette initiative pourrait générer des économies récurrentes de 15 M $ et ainsi contribuer à l’engagement de la STM de réduire ses dépenses de 100 M $ dans les cinq prochaines années. » Rappelons que le gouvernement de la CAQ met une pression énorme sur la STM pour réduire ses dépenses.

« La montée de la privatisation, on la voit en santé, on la voit dans l'éducation, on la voit un peu partout », dénonce Jeannotte. « On dirait qu'on empoisonne les systèmes publics en ce moment, en les rendant dysfonctionnels et coûteux. »

Mais les travailleurs d'entretien ne veulent pas aller dans cette direction. « On a nos mécaniciens, on a nos gens de bâtiments, on a nos centres de transport. On travaille pour garder ça à nous. C'est une société publique », qui devrait, selon lui, appartenir au peuple. «  J'espère que les gens vont être de notre côté pour garder ça à nous autres. »

Le droit de grève remis en question

Les travailleurs d’entretien avaient déjà essayé de faire la grève à la fin mai. Étant considérés comme un service essentiel, ils devaient soumettre au Tribunal administratif du travail (TAT) un scénario qui permettrait un maintien minimum des activités. Mais leur suggestion avait été rejetée… parce qu’elle aurait supposément causé des rassemblements de personnes agressives.

Jeannotte aurait aimé qu'ils puissent essayer le scénario qu'ils avaient proposé. « Ça aurait eu moins d'impact que ce qu'on a fait aujourd'hui, puis on aurait pu passer notre message de cette façon-là, mais le tribunal en a décidé autrement. »

Il remet en question les raisons données par le tribunal. Il considère les agressions contre les travailleurs de la STM comme la réalité d'une société malade qui ne s'occupe pas de ses gens vulnérables. « Des agressions, on en a eu plein le métro durant l'hiver, avec les gens en situation d'itinérance, les gens qui sont parfois dans le milieu de la drogue, tout ça. Est-ce que vraiment le fait d'avoir des autobus et pas de métro aurait amplifié ce phénomène-là ? On pense que non. »

Tout ça, alors que les négociations avec leur employeur sont loin d'être terminées. « On n'est même pas encore dans les demandes salariales, en ce moment », rappelle Jeannotte. « Si la STM continue d'être braquée, si c'est le même discours qu'on entend aux autres tables de négociation ― la sous-traitance, les mises à pied… Il va falloir s'attendre à avoir d'autres grèves, et même à passer un automne assez houleux. »

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