Depuis le 8 juin, 2 100 chauffeurs, livreurs et travailleurs d’entrepôt de DHL Express, représentés par le syndicat Unifor, sont en grève après avoir été jetés en lockout à minuit le même jour. Ils protestent contre les tentatives de l’entreprise de les forcer à parcourir jusqu’à 100 km pour commencer leur tournée, pour exiger des toilettes propres et sécuritaires, de meilleurs salaires, et d’autres revendications.
Le 13 juin, le comité de négociation d’Unifor représentant les travailleurs de DHL a rencontré le PDG de DHL Express Canada, Geoff Walsh. Celui-ci les a informés que l’entreprise comptait suspendre l’importation de colis internationaux d'ici au 16 juin si aucune entente de principe n’était conclue. Il leur a aussi dit que DHL fermerait toutes ses opérations au Canada le 19 juin, soit un jour avant l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi fédérale interdisant le recours aux briseurs de grève.
Bruce Daniel, un livreur de DHL à Halifax, a donné un peu de contexte à l'Étoile du Nord: « Pendant la COVID, comme les gens restaient chez eux et commandaient tout en ligne, DHL s’est rendu compte qu’il y avait un énorme afflux de ventes. Ils se sont mis à faire de l’argent à la pelletée », a-t-il dit.
« Ils n’arrêtaient pas de nous appeler des héros, de dire qu’ils étaient fiers de nous voir là chaque jour. Puis, quand les volumes ont redescendu au niveau d’avant la COVID, ils sont venus nous dire: “Vous l’avez eu trop facile trop longtemps. Il est temps de redonner un peu.” Mais de notre point de vue, c’était clair: “Vous nous avez rien donné, donc on peut pas redonner ce qu’on n’a pas.” »

Le moral est bon à Halifax
Daniel raconte que « depuis qu’on a installé notre première ligne de piquetage le lundi 9 juin, on est là douze heures par jour, chaque jour, toute la semaine ».
Il affirme que le moral est bon: « On sait tous quels enjeux s’en viennent. Les salariés à l’heure vont avoir leur hausse de salaire, ça, ils le savent. Mais ils savent aussi qu’avec cette hausse-là, la compagnie veut que les sous-traitants acceptent d’être payés moins. Tout le monde comprend qu’on se bat autant pour eux qu’eux se battent pour nous. Donc on est solides, on se soutient les uns les autres, et on va rester là aussi longtemps qu’il faudra. » Il ajoute que le syndicat « a dit clairement pour quoi il se bat, il acceptera rien de moins, et nous non plus ».
Pour ceux qui voudraient faire preuve de solidarité, Daniel dit que le plus important, c’est de faire affaire avec d’autres compagnies internationales pour les envois. Mais il encourage aussi à dénoncer le recours aux scabs et à la sous-traitance, et dit que les gens peuvent « juste passer en voiture, nous faire un signe de la main, klaxonner, nous montrer que vous savez qu’on est là, que vous vous en souciez, et que vous êtes derrière nous ».

Solidarité avec les travailleurs de Postes Canada
La grève chez DHL, et le lockout qui a suivi, survient peu après la reprise des négociations entre les travailleurs de Postes Canada et leur employeur. Leurs revendications sont semblables à celles des employés de DHL: de meilleures conditions de travail et des augmentations de salaire pour suivre l’inflation. Les postiers et leur syndicat ont refusé de faire des heures supplémentaires, poursuivant une lutte qui avait pris la forme d’une grève à la fin de 2024. Cette grève avait été suspendue en décembre après une décision du Conseil canadien des relations industrielles forçant un retour au travail.
Daniel explique que les employés de Postes Canada « vivent certaines des mêmes affaires que nous. Les compagnies veulent augmenter notre charge de travail sans augmenter notre paye, et dans un monde où le coût de la vie explose et où l’inflation dépasse les 10%, on n’a pas le choix d’avancer. Le prix monte toujours, mais l'argent redescend jamais vers ceux qui le créent. »
Mais il insiste: cette grève ne porte pas que sur les salaires.
« C’est une question de respect au travail. C’est une question de reconnaissance du fait qu’on est là tous les jours […] qu’on donne notre sang, notre sueur et nos larmes, et qu’en ce moment, y’a rien qui nous revient. Tout ce qu’on demande, c’est le respect qu’on mérite et qu’on attend. » Il conclut: « S’ils veulent qu’on donne tout, faut qu’ils donnent tout en retour. »