Le collège Langara a procédé à des mises à pied massives pour tenter de briser le rapport de force du syndicat des enseignants. Le personnel et les étudiants sont mis à rude épreuve alors que l’administration mal gérée de ce collège public fait face à une perte de revenus importantes.
Près d’un quart du personnel enseignant du collège basé à Vancouver, soit plus de 200 membres, a été mis à pied ou a vu son travail réduit. L’Association du personnel enseignant de Langara (LFA) a été tenue dans l’ignorance durant les négociations de contrat, sans parler de la restructuration en cours du collège, dont le plan a été entièrement généré par une intelligence artificielle.
Sous couvert d’anonymat par crainte de représailles, un enseignant travaillant à Langara depuis 10 ans, qui a parlé à L'Étoile du Nord, affirme avec certitude que les récentes actions de l’administration sont « à 100 % une attaque contre le syndicat ». En effet, bien que les enseignants à contrat temporaire soient syndiqués, leur type de contrat signifie qu’ils n’ont pas de véritable pouvoir ou levier dans leur combat contre l’administration.
Négociations pour une nouvelle convention collective
Pendant les négociations, il n’y a eu aucune communication de la part de l’administration. « Le collège joue vraiment dur. Ils ne fournissent aucune information au syndicat. » Le collège a refusé de dire combien d’enseignants ont été mis à pied. La LFA a dû estimer ce chiffre en calculant les cotisations syndicales perdues.
L’enseignant interrogé croit que l’administration cherche à réduire le nombre total de professeurs ainsi que celui des enseignants à « contrat permanent », qui garantit aux professeurs à temps plein une certaine quantité de travail et de salaire.
« Ils essaient de se débarrasser de ces gens-là. Et ils veulent en fait que tout le monde devienne enseignant à contrat temporaire. C’est comme le sujet ultime du néolibéralisme, on va être tellement "flexibles". »
Selon lui, l’administration transfert les risques aux enseignants en refusant de leur garantir un salaire et un travail en cas de faible inscription ou de suppression de cours. De plus, elle cherche aussi à ne pas payer les indemnités de départ.
« Ils ont leur propre interprétation de quand les indemnités doivent être versées, mais leur ‘interprétation’ signifie que ça pourrait littéralement ne jamais être payé. »
Mauvaise gestion et administration gonflée
Le collège public a dépensé 1,3 million de dollars en salaires de cadres lors de l’année scolaire 2023–2024. Paula Burns, la présidente, touche un salaire de 300 000$, tandis que les cinq vice-présidents gagnent chacun entre 150 000$ et 250 000$. Burns est arrivée à Langara malgré un vote de non-confiance à son égard par le corps enseignant du collège de Lethbridge en 2016, à cause d’allégations d’intimidation et de dépenses douteuses.

D'un autre côté, malgré les coupes massives, le collège n’a supprimé que 22 postes administratifs sur plus de 170. Cela représente 13%, comparé à près de 25% des postes d’enseignement coupés.
« Pendant l’essor des étudiants internationaux de 2015 jusqu’en [2024], l’administration a simplement gonflé », explique l’enseignant.
En 2021, la LFA avait organisé une motion de non-confiance contre le service des ressources humaines de Langara, qui a été adoptée à 96%. Selon l’interviewé, « il ne s’est littéralement rien passé après ça ».
L’enseignant affirme que « le collège détient toutes les cartes en ce moment », la LFA ayant perdu plus d’une centaine de membres en très peu de temps à cause des coupes.
Selon lui, ce changement dans l’équilibre des forces au collège a entraîné une baisse de la qualité de l’enseignement. « Les professeurs, les conseillers, on tient tous aux étudiants, mais l’administration, elle, s’en fou. »
Coupes dans le financement gouvernemental
La LFA a déclaré en 2024 que « le stress financier sur les étudiants est si grand que le collège Langara démarre une banque alimentaire sur le campus. Ça n'a pas toujours été comme ça. Quand beaucoup d’entre nous ont obtenu nos diplômes, le gouvernement couvrait 70 à 80% des coûts, ce qui nous permettait de nous concentrer sur nos études. »
Les coupes drastiques dans le financement de l’éducation dans les années 2000 ont entraîné une dépendance accrue aux frais de scolarité. Le financement par étudiant a chuté de 20% au cours des 15 dernières années. Avec une baisse attendue de 79% du nombre d’étudiants internationaux, le collège ne peut plus compter sur les frais élevés payés par ces étudiants pour bouler son budget.
L’interviewé explique la vision de l’administration: « Que les étudiants internationaux soient expulsés, suspendus ou déportés, ça n’avait pas vraiment d’importance. Ce qui comptait, c’était juste les frais de scolarité. »