L'Étoile du Nord

Le plan de Carney pour l’acier canadien

La promesse d’acier de Carney : des milliards pour les entreprises, des miettes pour les travailleurs

Mercredi dernier à Hamilton, en Ontario, le premier ministre Mark Carney a annoncé de nouveaux tarifs douaniers sur les importations d’acier en provenance de Chine, dans le but soi-disant de « protéger » l’industrie de l'acier canadienne et ses travailleurs. Le plan de Carney témoigne d’un engagement considérable envers les intérêts des dirigeants d’entreprise. En revanche, le premier ministre n’a offert aux travailleurs rien de plus que quelques promesses.

Au cours des derniers mois, le syndicat des Métallos (USW) a été très vocal dans ses appels au gouvernement pour qu’il prenne des mesures immédiates afin d’empêcher de nouvelles pertes d’emplois et d’offrir un soutien aux travailleurs licenciés, comme une bonification de l’assurance-emploi et un meilleur contrôle des importations d’acier étranger.

À la fin mars, près de 200 travailleurs de l’acier avaient été licenciés par des entreprises, notamment à l’usine Algoma Steel de Sault Ste. Marie (Ontario) et à l’usine Ivaco du Groupe Canada Metal Processing (MPG) à L’Orignal (Ontario). En juin, ArcelorMittal, géant luxembourgeois de l’acier, a licencié 153 employés en fermant son usine de fil à Hamilton.

Jusqu’aux mois de juin et juillet, certaines sources estiment qu’environ 1000 travailleurs ont perdu leur emploi dans l’industrie. Pendant des mois, ces travailleurs n’ont reçu que des excuses et des métaphores de leurs anciens employeurs. « Nos employés sont la colonne vertébrale de nos opérations », a déclaré Matt Walker, PDG de MPG, tout en licenciant plus d’une centaine de personnes et en défendant l’idée qu’une entreprise, tout comme un PDG, peut être vertueuse sans avoir de colonne.

Dans son annonce, le premier ministre a fait deux promesses aux travailleurs :

« En nous appuyant sur les améliorations à l’assurance-emploi (AE) et au programme de travail partagé, le gouvernement investit 70 millions de dollars dans les Ententes sur le développement du marché du travail pour offrir de la formation et un soutien au revenu aux 10 000 travailleurs de l’acier touchés. Grâce à des investissements dans la requalification et à un soutien accru aux travailleurs, nous veillerons à ce qu’ils disposent des compétences et du soutien nécessaires pour répondre aux besoins futurs de l’industrie. »

Le plan a été salué par le syndicat USW, dont la direction a déclaré que « l’annonce du premier ministre Mark Carney représente des gains majeurs pour les travailleurs ». Mais peut-on vraiment parler de victoire pour les travailleurs de l’acier canadiens, alors que les promesses tardives de Carney arrivent après tant de pertes ?

Il a fallu cinq mois et l’échec combinés de l’industrie et du gouvernement à protéger 1000 travailleurs pour que Carney annonce des « améliorations » à l’assurance-emploi. Aucune mention de la part du premier ministre à savoir si les entreprises devront réembaucher les 1000 travailleurs ni s’il entend empêcher de futurs licenciements. Malgré son statut d’industrie stratégique, aucune entreprise ne sera tenue responsable d’avoir mis en péril les moyens de subsistance des travailleurs canadiens.

Quant aux  70 millions de dollars pour la « formation et le soutien au revenu », rien n’indique comment cet argent sera distribué aux travailleurs, ni pourquoi le premier ministre estime que ces derniers doivent être requalifiés pour une industrie dans laquelle ils travaillent déjà.

Le reste du plan de Carney laisse entendre que son gouvernement est beaucoup plus à l’aise d’émettre de gros chèques aux entreprises que d’aider réellement les travailleurs. En plus d’un bouclier financé par les fonds publics contre la concurrence de l’acier étranger, le premier ministre offre aux entreprises 1 milliard de dollars via le Fonds stratégique pour l’innovation, 150 millions en fonds de compensation tarifaire, et l’accès à des dizaines de millions supplémentaires par l’intermédiaire du prêt tarifaire pour grandes entreprises.

Beaucoup de solidarité pour les résultats financiers des entreprises. Très peu pour les travailleurs.

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