La Cour d'appel de Paris a ordonné jeudi la libération de Georges Ibrahim Abdallah, militant communiste et propalestinien libanais. Celui-ci était emprisonné depuis 40 ans, faisant de lui le plus ancien détenu de France. Accusé d'être complice d'un assassinat de diplomates américain et israélien revendiqué par la Fraction armée révolutionnaire libanaise, groupe qu'il dirigeait, il est condamné à la prison à perpétuité en 1987. Il était alors âgé de 35 ans.
Le militant est éligible à être libéré depuis plus de 25 ans, mais il aura fallu 11 demandes de remise en liberté pour mettre fin à sa détention, jugée par le tribunal comme étant d'une "durée disproportionnée aux crimes commis". Abdallah, maintenant âgé de 74 ans, rejoindra le 25 juillet sa famille dans son village du Nord-Liban.
«S'ils ont accepté de me libérer, c'est grâce à cette mobilisation qui est ascendante», affirme le prisonnier politique lors d'une entrevue obtenue le jour de l'annonce par l'Agence France-Presse. «La sortie est suscitée par une dynamique globale: si le détenu politique ou militant qui est en prison arrive à s'inscrire dans la dynamique des luttes dehors, c'est la mobilisation des hommes et des femmes dehors qui le fait sortir,» ajoute-t-il.
En effet, la libération de Georges Ibrahim Abdallah est l'une des demandes phares du mouvement propalestinien en France et au Moyen-Orient, et ce depuis son arrestation. 2000 personnes se sont notamment réunies devant sa prison le 24 octobre 2024 pour cette revendication.

Des pressions diplomatiques
Plusieurs figures de l'État français ont dénoncé l'incarcération prolongée d'Abdallah. C'est notamment le cas d'Yves Bonnet, ancien chef de la Direction de la surveillance du territoire de France, un service de renseignement anti-terroriste. Loin d'être un supporter de la cause palestinienne, il dit: "Cette injustice a assez duré, elle a même dépassé les limites du raisonnable, plus rien ne justifie son incarcération, qu’on le mette dans un avion et qu’on le renvoie chez lui au Liban."
De l'autre côté, les gouvernements israélien et américain n'ont cessé de faire pression pour que le militant demeure derrière les barreaux. En 2013, dans un télégramme révélé par WikiLeaks, la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton écrivait au ministre français Laurent Fabius : « Il n'a pas montré de remords pour ses crimes et reprendra probablement son combat révolutionnaire s'il est libéré et expulsé vers le Liban. » Elle dit dans le même message vouloir que le gouvernement français trouve un moyen de rendre inopérant l'arrêt de libération rendu la veille par la cour d'appel.
Ce jeudi, l'ambassade israélienne dit "regretter" la décision de libérer Abdallah, affirmant que "De tels terroristes, ennemis du monde libre, devraient passer leur vie en prison".
« Nous sommes très heureux de cette décision », a pour sa part dit le frère de Georges, Robert Abdallah, dans une entrevue avec l'AFP. "Pour une fois, les autorités françaises se sont affranchies des pressions exercées par Israël et les Etats-Unis ».
« C’est à la fois une victoire judiciaire et un scandale politique qu’il ne soit pas sorti plus tôt, à cause du comportement des États-Unis et de tous les présidents français » a déclaré l'avocat du prisonnier politique, Jean-Louis Chalanset.