La plus longue grève dans le secteur public de l’histoire de la Colombie-Britannique étant désormais terminée, le gouvernement du NPD semble avoir perdu le soutien de nombreux travailleurs de première ligne du secteur public. Le gouvernement a refusé de négocier pendant des semaines, faisant des offres peu généreuses et déformant les revendications des travailleurs. Certains travailleurs de base réclament maintenant une rupture avec le parti politique.
70% des 34 000 travailleurs de la fonction publique de la Colombie-Britannique négociant sous la bannière du BC General Employees Union (BCGEU) ont voté en faveur de la ratification d’une entente de principe conclu le 26 octobre. Cela s’est produit après huit semaines de grève progressive et d’actions syndicales coordonnées visant à augmenter progressivement la pression sur l’administration Eby.
Mais malgré cette majorité décisive, tout le monde n’est pas satisfait du résultat, et le coût de la vie y est pour beaucoup. Les employés du gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique, qui se décrit comme « pro-travailleurs », sont moins bien payés que leurs homologues d’autres provinces ou d’autres niveaux de gouvernement, alors qu’un appartement de deux chambres à Victoria coûte près de 2 700 dollars par mois.
Sarah*, déléguée syndicale du BCGEU interrogée par L’Étoile du Nord, affirme que les gains salariaux obtenus après la grève sont moins importants que ceux de la dernière entente de principe. Elle a voté contre, qualifiant l’augmentation proposée de 3% par an pendant quatre ans « d’inacceptable compte tenu de l’inflation ». Elle explique que les réactions lors d’une réunion tenue à la fin de la grève étaient partagées et que certains étaient découragés et prêts à accepter l’accord et passer à autre chose.
« Certains de mes collègues les moins bien payés reçoivent toujours un salaire annuel de 51 000 dollars plus avantages sociaux », explique Sarah. Bon nombre de ces travailleurs de première ligne doivent régulièrement recourir aux banques alimentaires et ont été touchés par le fait de devoir compter sur leur salaire de grève pendant huit semaines.
En comparaison, selon Sarah, « ils paient beaucoup d’argent aux gestionnaires [non syndiqués]. En moyenne, ils gagnent 45 000 dollars de plus que nous ». Elle rapporte qu’il y a un gestionnaire pour trois travailleurs de première ligne, tandis que de nombreux postes vacants ne sont pas pourvus.
Cette attrition a entraîné une augmentation considérable de la charge de travail des employés de la fonction publique. « Avant, nous étions sept dans mon unité, et maintenant, nous ne sommes plus que cinq, mais nous faisons le travail de huit ou neuf personnes chaque jour. »
« Les fonctionnaires épuisés et gravement sous-payés méritent bien plus que des miettes et de maigres gains économiques. »

Évolution des opinions sur le NPD
Il a fallu près d’un mois à l’employeur après le début de la grève, le 2 septembre, pour inviter l’équipe de négociation du syndicat à la table des négociations. Selon Sarah, le gouvernement s’est présenté avec trois heures de retard, après avoir augmenté son offre salariale de seulement 0,5 % par an. Cela a conduit à une nouvelle rupture des négociations avant d’entrer dans une médiation non contraignante à la fin du mois d’octobre.
Le BCGEU souhaitait une augmentation de 4% par an pendant deux ans et une garantie d’ajustement en cas d’inflation supérieure à ce montant. Mais le refus du NPD provincial de céder sur ces revendications économiques fondamentales, combiné à ce que beaucoup considéraient comme un manque d’intérêt pour les conditions de vie des travailleurs de première ligne, a commencé à changer la façon dont certains travailleurs perçoivent le NPD.
Sarah a déclaré que beaucoup de ses collègues, qui ont toujours constitué une grande partie des bénévoles et de l’électorat du parti, ne voteront plus pour le NPD car « c’est pas un parti pour les travailleurs. Il est très clair qu’ils négocient de mauvaise foi et qu’ils font même pas la moitié du chemin ».
À titre d’exemple, elle a expliqué comment la ministre des Finances de la Colombie-Britannique, Brenda Bailey, a publié un rapport qui déformait les principales revendications du syndicat concernant les augmentations salariales.
Les grands médias tels que Global News, CBC et le Vancouver Sun ont répété ou repris ces affirmations « au point que notre président a dû intervenir pour dire: « Heille, on demande pas 15 % [sur deux ans], c’est ridicule ».
« S’ils voulaient vraiment soutenir les travailleurs, ils auraient dû revenir à la table des négociations et pas laisser les travailleurs attendre huit semaines sur les piquets de grève. »
Des liens entre les dirigeants syndicaux et le NPD
Lors du congrès du BCGEU en 2024, le premier ministre de la Colombie-Britannique, David Eby, et le chef du NPD fédéral de l’époque, Jagmeet Singh, ainsi que des dirigeants syndicaux provinciaux et nationaux, figuraient parmi les « orateurs renommés » invités à s’exprimer sur les questions importantes auxquelles sont confrontés les travailleurs.
« Ils ont littéralement invité notre propre employeur, mon employeur, David Eby. Beaucoup d’entre nous ont quitté la salle ce jour-là. »

Source: Facebook, David Eby.
Rétrospectivement, Sarah estime que les relations entre la direction du syndicat et le NPD, ainsi que sa stratégie de grève progressive, devraient être examinées de près par les membres:
« On aurait pu mieux nous battre. On aurait pu nous battre davantage. On est 34 000 fonctionnaires qui auraient tous pu faire grève. Si on avait porté un coup dur, comme l’ont fait les travailleurs d’Air Canada avec le SCFP, on aurait obtenu un bien meilleur accord. »
Contrairement à ce que prétendent les dirigeants, Sarah estime que la stratégie de l’exécutif syndical, qui consistait à intensifier progressivement l’action syndicale sur plusieurs semaines à partir d’une action relativement modeste au départ, a surtout favorisé le gouvernement néo-démocrate. Elle estime également qu’il y avait un conflit d’intérêts qui a pu compromettre leur capacité à négocier dans l’intérêt des membres.
L’accord ratifié
Sarah affirme que même si les grévistes ont remporté quelques victoires importantes, l’accord est loin de répondre à ses attentes.
L’une des principales avancées pour les travailleurs est la fin de l’ancienne grille de classification des emplois, qui maintenait les salaires artificiellement bas. Un autre avantage est la mise en place d’un nouveau processus d’examen pour les postes de direction exclus. Un tribunal des griefs plus rapide est également prévu, et certaines primes seront désormais intégrées directement au salaire de base. Cependant, sur les questions les plus urgentes pour de nombreux membres, l’accord est loin d’être satisfaisant.
Outre l’augmentation salariale de 3%, certains ajustements ciblés seront accordés aux travailleurs les moins bien rémunérés. Mais selon Sarah, de nombreux travailleurs ne les verront pas avant 2027.
L’accord ne prévoit pas le compte de dépenses de santé réclamé par les travailleurs ni les protections liées à l’ajustement du coût de la vie. « On obtient donc même pas ce que le syndicat qualifiait de modestes augmentations des avantages sociaux… Alors, qu’est-ce qu’on obtient, réellement ? »
Sarah a fini en expliquant comment d’autres travailleurs et organisations pourraient soutenir les travailleurs du BCGEU à l’avenir. Elle a souligné la nécessité d’une « éducation de classe, ce que, malheureusement, de nombreux syndicats d’entreprise ne font pas, y compris le nôtre… Nous pouvons informer d’autres syndicats de ce que nous avons vécu, de ce qui a fonctionné et de ce qui n’a pas fonctionné. En d’autres termes, nous devons également nous organiser ».
« Rejoignez votre organisation locale de travailleurs et informez votre famille et vos amis de nos revendications, parce que les employeurs ont recours à beaucoup de mythes et mensonges… C’est cette propagande capitaliste-là dont il faut s’échapper pour que tous les travailleurs de la classe ouvrière commencent à se libérer et à s’élever les uns les autres. »
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