« On va mettre les travailleurs en premier »

Après la mort d’un collègue, des concierges veulent démocratiser leur syndicat

Des préposés à l’entretien de l’université Simon-Fraser se battent pour démocratiser leur syndicat après que ses dirigeants n’aient pas réagi à la détérioration de leurs conditions de travail, qui a entraîné le décès d’un collègue au travail.

Alors que des élections pour la direction de la section locale 3338 du SCFP bat son plein, ceux-ci tentent de faire élire leurs candidats. Ces préposés à l’entretien de BEST Service Pro, qui travaillent au campus Burnaby, mettent de l’avant les problèmes généralisés qu’ils vivent sur le terrain. Ils espèrent que ces élections, qui se terminent le 25 novembre, leur permettront de promouvoir une plus grande implication de la base sur les questions fondamentales et lors des négociations avec l’employeur.

L’Étoile du Nord s’est entretenu avec trois travailleurs, Adhya, Preet et Mahi*, qui ont tous affirmé que les travailleurs ne peuvent réellement se battre que si leur syndicat représente véritablement leurs intérêts. 

Adhya, un travailleur qui nettoie le campus depuis plus de 10 ans, estime que la première étape pour changer les choses est que les travailleurs s’approprient leur syndicat. « Chaque travailleur doit savoir qu’on a tous des droits. On peut s’exprimer. On doit savoir que nous pouvons agir sur nos . »

Après des retards dans le processus de mise en candidature et des tentatives de la direction syndicale sortante pour écarter des travailleurs, deux concierges qui cherchent à démocratiser le syndicat figurent désormais sur le bulletin de vote. Les travailleurs derrière cette initiative nettoient le campus Burnaby de la SFU depuis des années, certains depuis plus de dix ans.

Surinder Dhaliwal et Ranjit Takhar se présentent respectivement aux postes de représentant de leur unité (qui regroupe plus de 60 agents d’entretien externalisés) et de vice-président 2, selon un communiqué publié par une organisation indépendante du campus. 

Problèmes au sein de la section locale du syndicat

Les travailleurs interrogés affirment que leur syndicat doit mieux défendre leurs intérêts sur les enjeux essentiels du quotidien. Selon eux, ce n’est pas ce qui s’est produit sous la direction actuelle de la section 3338, menée par la présidente Shaneza Bachus.

Preet raconte qu’un groupe de travailleurs a décidé collectivement, il y a un an, de reprendre davantage en main leur syndicat. En mai, ils ont tenté de faire part de leurs préoccupations concernant la surcharge de travail et la sécurité au travail lors d’une assemblée générale en ligne. La direction locale leur a refusé la parole à plusieurs reprises, les mettant en sourdine ou parlant par-dessus eux.

« Surinder essayait de prendre la parole pour dire que [les travailleurs] souhaitaient se proposer [pour des postes vacants]… mais Shaneza l’a systématiquement mise en sourdine pendant toute la réunion. »

Moins de deux mois plus tard, leur collègue Kulbir Kaila est morte pendant son quart de travail, victime de surmenage. Ce décès a poussé les concierges à redoubler d’efforts pour s’organiser et obtenir une représentation syndicale plus solide.

Lors d’une assemblée générale en octobre, après la mort de Kulbir, Mahi dit qu’ils ont pressé la direction d’expliquer pourquoi les mises en candidature avaient été retardées d’un mois: « Nous avons commencé à nommer les règlements internes qui étaient enfreints, parce qu’on ne nous laissait pas parler. »

Ces règlements garantissent leur droit de proposer des candidatures.

En réponse, la présidente Bachus a reconnu que la direction n’avait pas rempli ses obligations et que le retard constituait bel et bien une violation des règles. Ce n’est qu’après une pression continue de la base que l’exécutif a finalement lancé le processus électoral ce mois-ci.

Les revendications de la base

Le scrutin à venir marque la première tentative depuis 15 ans de concierges de cette unité pour occuper des postes de direction syndicale. Leur objectif est simple: « Mettre les travailleurs en premier. »

Si élus, Mahi affirme que les candidats militeraient pour que les travailleurs aient accès à leur convention collective et soient mieux représentés lors des prochaines négociations avec l’employeur.

« Nous n’avons même pas accès à notre convention collective. Si nous connaissons mieux nos droits, nous pourrons commencer à nous tenir debout ensemble et dire que ça ne fonctionne pas. »

Leurs revendications portent d’abord sur la sécurité des travailleurs, ce qui implique de mettre fin aux conditions éprouvantes de surcharge et au auxquels ils sont soumis. Selon eux, ils doivent nettoyer en moyenne 15 étages par jour et souffrent de blessures chroniques et de niveaux de stress dangereux.

« On est torturés mentalement… il nous arrive même de sauter nos pauses parce qu’on nous rappelle sans cesse pour faire plus de travail que prévu », explique Adhya.

Les travailleurs affirment que leur démarche s’inscrit dans un objectif plus large: reconstruire une où l’ensemble des membres du SCFP 3338, des professionnels aux employés de nettoyage, peuvent exiger des conditions de travail équitables et sécuritaires grâce à un syndicat fort et démocratique.

*Des pseudonymes ont été utilisés pour protéger les travailleurs contre le harcèlement.

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