L'Étoile du Nord

Grève dans Liquor Mart du Manitoba

Des travailleurs pris en étau entre vols violents et payes de misère

Temps de lecture:3 Minute

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La grève en cours depuis le 19 juillet chez Manitoba Liquor & Lotteries (MBLL) révèle une tension latente au Manitoba. L'Étoile du Nord a recueilli les témoignages de travailleurs anonymes, évoquant un conflit qui perdure depuis 2017, année où les employés de MBLL n'ont reçu qu'une hausse salariale de 1,75 % sur quatre ans.

Entre 2017 et 2021, les employés de MBLL ont connu une importante diminution de leur pouvoir d'achat, et leur sécurité au travail n'a jamais été garantie. La violence est une constante pour les employés de Liquor Mart, culminant en 2019 avec une série de braquages de plus en plus agressifs. Des bandes armées envahissaient les magasins, laissant les travailleurs dans la crainte constante pour leur sécurité lors de chaque quart de travail.

"On a jamais été aussi mal payés de toute notre vie. J'ai vu une machette de 30 cm de long traverser le magasin, juste à côté d'une femme enceinte". Un travailleur anonyme a déclaré à l'Étoile du Nord, "on avait besoin d'une personne à temps plein rien que pour rédiger les rapports d'incidents. On pouvait en faire jusqu'à 16 ou plus par jour". 

"Y'avait beaucoup de tension et de stress. Certaines personnes prenaient des congés pour cause de stress après un incident."

Les employés de MBLL sont frustrés vis-à-vis du gouvernement. Ils affirment qu'il "n'a pas fait et ne fait toujours pas grand-chose pour aider les personnes qui luttent pour survivre dans notre communauté. Même si la mise en place des portes [à accès contrôlé] a permis d'éviter de nombreux incidents à l'intérieur du magasin, on est toujours témoins de la souffrance de nombreuses personnes à l'extérieur de notre magasin".

Manifestation le 15 août, devant le parlement manitobain

En 2018, il y a eu en moyenne 10 à 20 vols par jour dans les Liquor Marts de Winnipeg, une ville de moins d'un million d'habitants. Pendant cette période, les travailleurs ont dû s'inquiéter d'être frappés par des bouteilles, des blocs de glace jetés dans le magasin, des poussettes poussées au sol, des chiens lâchés dans le magasin et même de la menace d'être poignardés.

Krisjan McNeill, employé de Liquor Mart, a témoigné lors d'un rassemblement de la façon dont MBLL traitait ses employés pendant la pandémie: "On a été considérés comme vitaux, critiques, tout sauf essentiels, vu qu'on avait pas été classés comme tels pour bénéficier des avantages liés au statut de travailleur essentiel. Nos magasins sont restés ouverts et on est venus travailler tous les jours dans des conditions incertaines, alors que d'autres entreprises n'avaient pas le droit de rester ouvertes. On a été très rentables, car nous avons été la principale source de revenus de la province pendant la pandémie".

"La pandémie a duré longtemps, il aurait fallu plus de reconnaissance ou d'incitatifs... Et maintenant [l'offre de l'employeur], c'est une gifle, un "F* you". Les mots me manquent. On parle de quelques sous, essentiellement, on se bat pour des cennes. Comment ça qu'ils ne peuvent pas nous augmenter un peu plus?"

Manifestation le 15 août, devant le parlement manitobain

"Je suis déçue que notre entreprise nous combatte si durement. Ils mentent et déforment la réalité de la situation pour faire croire au public que le syndicat ne nous soutient pas et qu'il nous a en quelque sorte forcés à faire cette grève."

"En même temps, je pense que si je pars maintenant, ils vont juste rendre les choses plus difficiles pour la prochaine personne qui arrivera, alors je vais pas me laisser abattre... C'est un moment très critique de l'histoire où les travailleurs doivent rappeler à ceux qui sont au sommet que nous sommes plus importants que leurs profits à court terme!"

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