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Cet été, les feux de forêt continuent de faire rage dans l'ouest du Canada et les pompiers risquent chaque jour leur vie sur le terrain. Leurs conditions de travail sont souvent difficiles, et la vie n'est pas toujours rose lorsque le monde brûle autour de vous et que vous manquez constamment de ressources pour le combattre.
En Alberta, il y a actuellement 122 feux de forêt, dont le complexe Jasper Wildfire de 32 000 hectares, qui a entraîné l'évacuation de milliers de personnes de la ville de Jasper et des zones de loisirs du parc national qui l'entourent la semaine dernière.
En Colombie-Britannique, 349 feux de forêt brûlent actuellement, dont six sont considérés comme des « incendies notables » parce qu'ils menacent activement des zones d'habitation. Si l'évacuation de Wells B.C., que l'Étoile du Nord a rapportée dernièrement, a été annulée, 22 autres ordres d'évacuation restent en vigueur dans toute la province, y compris dans le village de Slocan et ses environs dans la région de West Kootenay.
Pour mieux comprendre les raisons de l'augmentation des feux de forêt et les conditions de travail de ceux qui les combattent, l'Étoile du Nord s'est entretenu avec Rob, un pompier forestier expérimenté. Il a demandé à ne pas utiliser son vrai nom et à ne pas révéler son identité.
Un paysage et un travail en mutation
« La quantité de travail a augmenté de façon spectaculaire », déclare Rob, qui attribue l'augmentation considérable des feux de forêt au cours des dernières années à la combinaison du changement climatique et du régime de gestion forestière visant à garantir les profits des grandes entreprises forestières de la Colombie-Britannique. « C'est vraiment de là que vient [le B.C. Wildfire Service]. »
« À l'époque, les priorités étaient de protéger le bois destiné à la coupe, les infrastructures hydroélectriques et peut-être les zones de loisirs. Aujourd'hui, le bois est dans un état pitoyable. Il reste sur la liste, mais on est à peine capables de protéger les propriétés privées. »
« Il y a pas si longtemps, les incendies étaient, en moyenne, beaucoup moins fous. La plupart des incendies sur lesquels on se rendaient étaient des feux de brousse. C'est sûr qu'il y avait des risques, comme pour tout les autres travailleurs de brousse et de forêt—"tombe pas de l'hélicoptère", "laisse-pas tomber un arbre te tomber dessus", etc—mais il n'y avait pas le stress de "ah aussi, laisse pas le feu brûler toutes les maisons de ces gens-là, parce qu'ils te regardent tous en ce moment même". Il y a eu des moments comme ça avant […], mais maintenant c'est tous les ans. »
« Le nombre de fois où, au cours des trois dernières années, j'ai entendu des pompiers très expérimentés me dire que "c'est les feux les plus fous que j'aie jamais vu", c'est intense. Avant, le monde te parlaient de l'incendie auquel ils avaient participé il y a quatre ans ou quelque chose comme ça. Maintenant, ils ne se souviennent même plus d'il y a trois ans. »
« Privatisation et modèle de travail très précaire »
Si Rob parle avec fierté du rôle que jouent les pompiers en première ligne pour défendre les communautés et répondre aux catastrophes, il s'inquiète de la viabilité du B.C. Wildfire Service sous sa forme actuelle.
« On a connu une forte rotation au cours des cinq dernières années, parce que les incendies sont tellement violents qu'ils épuisent les effectifs. Même si le dernier chèque de paye des gens semble être un bon montant, ça vaut pas la peine. »
Il ajoute que pour la plupart des gens, la lutte contre les feux de forêt ne peut pas être une carrière, « parce que la job n'a jamais été conçue comme ça. C'est assez mal payé, mais comme c'est un travail qui fonctionne en sprint très intense, si t'es prêt à consacrer ta vie à quelques mois par année… tu peux gagner un peu d'argent. »
En échange d'un salaire de départ de 27$/h, le B.C. Wildfire Service demande beaucoup à ses membres. « Notre horaire de base est celui d'un fonctionnaire normal, soit 35 heures par semaine. Mais quand on est sur un incendie, c'est presque comme s'il n'y avait pas de règles. »
« En vérité, il y a beaucoup de règles, mais elles ne sont pas appliquées de manière très restrictive, disons. On peut travailler 14 jours d'affilée avant de devoir prendre un minimum de deux jours de repos, plus ou moins. On peut travailler 16 heures, voire plus. Parfois, on travaille 24 heures, mais ça ne peut pas durer très longtemps. De toute façon, si on a un nouveau feu, on travaille souvent jusqu'à ce qu'on rentre chez nous. »
Mais ce n'est pas la seule chose qui rend ce travail difficile. « Je trouve que l'aspect le plus traumatisant du feu, c'est l'impact sur la vie familiale. C'est pour ça que je tire la sonnette d'alarme au travail. Et l'acceptation culturelle de ce phénomène est vraiment terrible. »
« On peut entendre des gens dire des affaires comme "j'ai pas vu mon enfant depuis une semaine", ou "je reviens d'une semaine sur ce feu, et ils me renvoient encore à 5 heures du matin demain, haha". Pourtant, c'est pas drôle. Je sais que c'est comme ça qu'on reste stoïque, et dans la game, on fait des blagues à ce sujet-là, mais c'est pas positif. »
« Et c'est pas seulement [le manque de ressources], en fait c'est pire que ça. Pourquoi? Parce qu'en fait c'est le plan, c'est supposé se passer comme ça. C'est pas "oh fuck, c'est un accident". Ça a toujours été le plan. Et c'est ce qui est encore plus grave. »
En réponse aux salaires et aux conditions de travail inadéquats des pompiers, leur syndicat, le B.C. Government Employees Union (BCGEU), a lancé une campagne en 2023, appelant à une révision du système de rémunération et à ce que les pompiers reçoivent des pensions similaires à celles des autres intervenants en sécurité publique.
Rob souligne qu'en plus du modèle de travail précaire, le B.C. Wildfire Service a été organisé de manière à permettre aux entreprises privées de tirer profit du service public :
« D'une certaine manière, la majeure partie de notre secteur est privatisée, en ce qui concerne la lutte contre les feux de forêt. Tout ce que BC Wildfire fournit, ce sont des bottes sur le terrain, des gens en chemise rouge. Ils fournissent ensuite l'équipe de gestion des incidents, composée essentiellement de membres de BC Wildfire, ainsi qu'une partie de la logistique interne—en gros, ils montent les tentes. »
« Tout le reste est privé, tout l'équipement qu'on utilise, tout l'équipement lourd et l'aviation. L'aviation, c'est de loin la plus grosse dépense. Les sommes dépensées là-dessus sont obscènes. »
« Si t'es pas habitué au fonctionnement de la privatisation, ce qui est le cas de nombreux travailleurs, tu y penses même pas. Mais les sous-traitants font probablement 50% du travail. Et puis on engage aussi pleins de pompiers contractuels, par le biais de groupes ou d'entreprises. »
La réponse aux catastrophes, un besoin réel
Dans le contexte d'un climat changeant, d'une escalade des événements météorologiques et des catastrophes naturelles, une organisation globale pour répondre aux catastrophes est absolument nécessaire. Au cours de trois des quatre dernières années, l'armée canadienne a été appelée pour lutter contre les feux de forêt en Colombie-Britannique et en Alberta. Rob imagine que le B.C. Wildfire Service pourrait jouer ce rôle s'il disposait de la vision et des ressources nécessaires :
« J'ai l'impression que BC Wildfire pourrait devenir une organisation très solide qui ferait toutes sortes de choses, un service tout simplement extraordinaire. Des choses comme les BC Search and Rescue Associations devraient être complètement absorbés par BC Wildfire, en prenant des organisations séparées et sans coordination [et en l'organisant de manière centralisée, en tant que service public]. Ensuite, elles devraient être transformées en un service fonctionnant toute l'année et proposant des services de recherche et de sauvetage, de lutte contre les incendies, d'intervention en cas d'inondation, devenant ainsi un service d'intervention en cas de catastrophe. »
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