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La Société de Transport de Montréal (STM) a récemment annoncé des coupes budgétaires de 36 millions de dollars pour l'année 2024. Au total, 230 postes seront abolis par la STM cette année, supposément « sans toucher à l’offre de service ». Le Syndicat des professionnelles et des professionnels de la STM (SEPB 610) n'est pas du même avis, et les usagers peuvent, eux aussi, témoigner de l'augmentation des arrêts de service dans le métro. Ceux-ci sont en croissance constante depuis 3 ans, selon les chiffres de la STM.
Benoit Tessier, le vice-président du SEPB 610, dénonce une mauvaise planification de la part de la STM. Selon lui, les coupures ne s'attaquent pas aux réels problèmes, le recours aux sous-traitants et le manque de ressources allouées à l'entretien des actifs. L'Étoile du Nord s'est entretenue avec lui pour mieux comprendre la situation.
« On coupe dans les ressources, on coupe dans le financement et on s'attend à autant de résultat et de prestation de travail, sinon plus. Donc le résultat de ça, c'est la surcharge de travail, les risques d'épuisement professionnel et les impacts sur le service qui est livré parce que les professionnels soutiennent le service. »
Normalement, les équipes d'entretien interviennent pour assurer la fiabilité de l'infrastructure, des véhicules et des équipements comme les escaliers mécaniques. Toutefois, « quand on est contraint de faire des choix, de prioriser le plus urgent, ces programmes préventifs d'entretien, on va les mettre de côté. On dit oui, il faudrait faire ça, mais on a quelque chose de plus urgent, donc on va faire le plus urgent et on va laisser faire le préventif. »
« C'est une façon beaucoup moins efficace de gérer. C'est ça l'ironie de la chose, le gouvernement coupe dans le financement en disant 'on veut chercher plus d'efficacité, plus d'optimisation', mais ça donne exactement le contraire. On va réparer une fois que ça va être brisé, mais il va y avoir un impact sur le service. Donc, on va avoir moins de véhicules pour offrir le service, on va avoir des escaliers mécaniques qui ne fonctionneront pas, on va avoir plus de chantiers dans les stations de métro parce qu'il va y avoir du béton à réparer. »
M. Tessier dénonce aussi l'omniprésence des sous-traitants externes dans les bureaux de la STM. Selon lui, environ la moitié des 800 employés qui travaillent sur le maintien des actifs et le prolongement de la ligne bleue seraient des employés de firmes externes. « Nous, c'est ça qu'on questionne. Pourquoi faire appel au secteur privé pour des programmes d'investissement qui durent aussi longtemps dans le temps? Le maintien des actifs, ça fait 25 ans au moins que ça dure parce qu'il y a toujours de l'équipement à remplacer. Il y a toujours des nouvelles infrastructures à construire. »
« La STM dit encore que quand il y a moins d'investissement, le fait de fonctionner avec le privé fait en sorte qu'elle peut dire à la firme privée qu'elle a besoin de moins de ressources. Comme ça, ça permet d'éviter de faire des mises à pied. Ce qu'on observe dans la réalité, c'est que ce n'est pas vraiment le cas. Depuis la dernière année, il y a moins d'investissement du gouvernement. Nos membres sur le terrain n'ont pas vu beaucoup de gens du privé retourner chez eux. Cet argument-là, on ne l'achète pas. »
Les firmes privées font simplement office d'agence de recrutement pour la STM dans bien des cas, selon Tessier. « Ce que la firme privée fait, une fois qu'elle a obtenu le contrat, elle affiche des postes sur le marché. On peut regarder sur les sites d'emplois populaires, vous allez voir des emplois de Stantec, de EXP, etc., qui disent 'venez travailler au bureau de projet de la STM'. Donc cette idée-là qu'il y a une grande expertise à aller chercher dans le privé, ce n'est pas vrai. »
Ces embauches occasionnent également du travail supplémentaire pour les employés permanents de la STM. « Nos membres qui reçoivent ces nouveaux collègues-là, ils doivent les former. Ce sont des gens qui n'ont pas l'expérience, la connaissance du métro de Montréal, ça ne s'entend pas ailleurs qu'à la STM. »
« Ça s'inscrit dans une logique gouvernementale de penser spontanément, sans vraiment vérifier, que le secteur privé est plus compétent, plus efficace, il a plus d'expertise que le secteur public. On sent cette idéologie-là en toile de fond. L'influence du gouvernement se fait via les programmes de financement qui vont financer ces projets-là. »