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Le lundi 6 novembre, 420 000 travailleurs du secteur public au Québec, représentés par un Front commun de syndicats, ont participé à une grève d'une demi-journée. Malgré un soutien massif à la grève illimitée, avec 95% des votes en faveur, et une grande manifestation réunissant plus de 100 000 travailleurs à Montréal le 23 septembre dernier, le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) n'a proposé qu'une augmentation salariale de 10,3% sur cinq ans le 29 octobre 2023.
Cette proposition est considérée comme "une nouvelle claque au visage" et comme "dérisoire" par les travailleurs du Front commun, surtout en la comparant avec les augmentations de 30% accordées aux parlementaires et de 21% proposées aux policiers de la Sûreté du Québec. "C'est une insulte. C'est trop peu, trop tard" déclarait la coalition de syndicats lors du dépôt. Elle estime que, compte tenu de l'inflation de 16% depuis 2020, cette proposition équivaudrait en réalité à une réduction du salaire réel des travailleurs du secteur public.
En comparaison, les revendications du Front commun incluent une augmentation salariale immédiate de 100$ par semaine, l'indexation des salaires à l'inflation, ainsi qu'une hausse de 3% en 2024 et de 4% en 2025, la préservation du régime de retraite, l'amélioration des primes d'assurance et la reconnaissance des lanceurs d'alerte.
La grève des travailleurs du Front commun survient dans un contexte où les gouvernements successifs au Québec, depuis presque trois décennies, ont mis en place des réformes qui ont progressivement démantelé le secteur public. Cela a eu pour conséquence non seulement la détérioration des conditions de travail, mais aussi des infrastructures, de la qualité des services et du fonctionnement administratif en général.
"Nos membres sont épuisés, on n'a plus de relève, le monde quitte" expliquait à l'Étoile du Nord Nathalie Moreau, présidente de l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux du CHUM (APTS-CHUM) et technicienne de laboratoire. "Dans les dernières années, j'ai perdu à peu près 10% de mes membres par année." Selon elle, beaucoup quittent leur profession entièrement, et ceux qui restent "sont en surcharge ou en maladie."
Au lieu de remettre en question cette tendance, le gouvernement actuel de la CAQ semble vouloir aller encore plus loin dans la même lignée que les réformes précédentes, notamment dans le secteur de l'éducation (PL-23), de la santé (PL-15) et du logement (PL-31). Mme Moreau soulignait que ces réformes successives sont inefficaces sans investissement. Les travailleurs manquent de contrôle sur l'organisation de leur travail, et elle critique le gouvernement qui "ne parle pas au monde du plancher. C'est du monde dans leur tour d'ivoire."
À ce sujet, Nathalie Chalifoux, représentante nationale pour l'APTS, déclarait lundi à l'Étoile du Nord que "le gouvernement fait des choix, il dit qu'il n'a pas d'argent, mais il en a dans le fond. C'est juste qu'il a décidé d'en mettre dans des batteries et de donner des chèques aux gens pour gagner en popularité électorale. Nous on dit que c'est à lui de mettre l'argent aux bonnes places. Si on veut garder le réseau public en santé, il faut mettre de l'investissement."
Face à l'impasse dans les négociations, le Front commun a déjà annoncé la prochaine série de grèves prévue du 21 au 23 novembre 2023, tout en évoquant la possibilité d'une grève générale illimitée si nécessaire. Dans le cas où cela se produirait, la plupart des experts estiment que le gouvernement pourrait recourir à une loi spéciale pour forcer le retour au travail, rendant ainsi la grève illégale. Cette probabilité est d'autant plus élevée en tenant compte du précédent établi lors de la confrontation avec le Front commun en 1972.
Néanmoins, les travailleurs sur le piquet de grève du CHUM à Montréal ne semblaient pas découragés face à cette perspective. Nathalie Moreau, lorsque questionnée sur la possibilité d'une loi spéciale, affirmait: "Est-ce que je suis prête à aller en prison? Oui, je vais y aller moi, il n'y a pas de problème. Nous ce qu'on veut c'est négocier, si on n'a pas le choix, on va y aller en GGI [grève générale illimitée]. S'ils ont l'odieux de passer une loi spéciale... Ils vont perdre le peu de crédibilité qu'ils ont présentement."
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