L'Étoile du Nord

Les travailleurs d’un entrepôt de Walmart en Ontario forment un syndicat

« On a écrit une page d’histoire du Canada » 

Temps de lecture:5 Minute

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Les travailleurs d'un entrepôt Walmart à Mississauga, en Ontario, ont voté la semaine dernière en faveur de la création d'un syndicat sur leur lieu de travail. Il s'agit du premier entrepôt Walmart à se syndiquer au Canada, non sans rappeler la récente syndicalisation d'un entrepôt d'Amazon à Laval.

Entre 800 et 900 travailleurs sont actuellement employés dans l'entrepôt du monopole du commerce de détail à Mississauga. Ils effectuent des travaux de préparation des commandes, d'emballage et d'entretien. La victoire des travailleurs survient après une campagne de neuf mois menée par Unifor dans l'entrepôt, qui a débuté en décembre 2023.

« Cette victoire est le résultat d'une unité autour de la démocratie au travail et de meilleures conditions de travail », a déclaré la présidente nationale d'Unifor, Lana Payne, dans un communiqué de presse. « Les travailleurs de Walmart à Mississauga ont défendu leurs droits, et nous sommes ravis de travailler sur leur première convention collective. »

« On a écrit une page d'histoire au Canada », a déclaré Rodolfo Pilozo lors d'une entrevue avec l'Étoile du Nord. M. Pilozo travaille à l'entrepôt depuis 29 ans.

Plus de 40% des travailleurs de l'entrepôt ont signé une carte syndicale cet été. Cela a permis à Unifor de soumettre une demande à la Commission des relations de travail de l'Ontario, qui a autorisé un vote pour la syndicalisation de l'entrepôt. Jeudi dernier, la majorité des travailleurs de l'entrepôt ont voté en faveur de l'adhésion à Unifor.

Justin Gniposky, directeur de l'organisation d'Unifor, a précédemment déclaré à L'Étoile du Nord que les travailleurs de l'entrepôt avaient quatre préoccupations principales: la santé et la sécurité, l'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, la sécurité de l'emploi et une véritable augmentation de salaire.

« Walmart peut faire mieux »

Lors de son entretien avec l'Étoile du Nord, M. Pilozo a fait part de ses motivations pour lutter en faveur de la syndicalisation. « On devait informer les gens sur le syndicat. Je devais m'informer moi-même. » M. Pilozo a été le témoin direct de la détérioration rapide des conditions de travail dans l'entrepôt au cours des dernières années, en particulier en ce qui concerne la santé et la sécurité.

Il explique que « la plupart du temps, on a tendance à dépasser le nombre de cas de blessures prévus par Walmart. Les travailleurs ont des problèmes d'épaule, de cou et de dos, mais pour Walmart, ce sont les chiffres qui comptent. Une fois que t'es blessé, ils te considèrent comme si t'étais rien, et tu dois revenir au travail, même si c'est pour balayer les sols. »

« Ils ont modifié nos avantages sociaux », ajoute-t-il. Auparavant, les travailleurs des entrepôts bénéficiaient d'une couverture à 100% des ordonnances dans les pharmacies de Walmart et à 80% dans les autres pharmacies. Walmart a réduit cette couverture à 50% dans les autres pharmacies. « Que faire s'il n'y a pas de Walmart près de chez soi? », a demandé M. Pilozo.

« Ils ont fait passer nos horaires de 8 à 10 heures. Ce changement nous a été imposé. Avant ça, on avait deux pauses et un dîner. Aujourd'hui, on a plus qu'une pause et un dîner. Je pense que si on avait eu une représentation syndicale, les choses auraient été bien différentes », a expliqué M. Pilozo.

M. Pilozo a indiqué qu'après la pandémie de COVID-19, le coût de la vie a augmenté, mais que les salaires ont stagné ou n'ont progressé que lentement. « Walmart peut faire mieux. On veut au moins rattraper le coût de la vie », a-t-il déclaré.

La panoplie des tactiques antisyndicales de Walmart

Les travailleurs espèrent que la syndicalisation leur permettra de négocier de meilleures conditions de travail. Toutefois, la campagne de syndicalisation n'a pas été sans difficulté.

Depuis décembre 2023, la direction de Walmart a déployé des efforts considérables pour dissuader les travailleurs de se syndiquer. Elle a notamment diffusé des informations erronées sur le syndicat, intimidé les travailleurs, n'a pas renouvelé leurs contrats et a même tenté d'acheter les travailleurs en leur offrant de petits avantages sur le lieu de travail.

« L'entreprise notoirement antisyndicale a fait de son mieux pour répandre des mensonges sur les protections d'un syndicat, mais les travailleurs ont vu clair dans l'intimidation à peine voilée et ont choisi l'unité plutôt que la peur et la division », a déclaré l'Unifor dans son communiqué.

M. Pilozo a confirmé que c'était bien le cas. « Ils disaient que les syndicats faisaient de fausses promesses, mais le syndicat n'a jamais promis d'argent aux travailleurs. Tout ce qu'ils ont dit, c'est qu'ils pouvaient s'asseoir à la table des négociations et nous aider à obtenir de meilleurs salaires, de meilleurs avantages sociaux, un meilleur plan de pension, et même essayer de négocier pour les retraités ».

Comme M. Pilozo était activement impliqué dans la campagne de syndicalisation, la direction l'a surveillé de près. « Si j'allais dans un autre secteur de l'entrepôt et que quelqu'un m'appelait pour me poser une question, ils me bippaient immédiatement. Ils me gardaient confiné à mon poste de travail ».

La direction de Walmart aurait également exercé des représailles à l'encontre des nouveaux travailleurs sous contrat à court terme qui avaient signé une carte syndicale. « Lorsque la direction s'est aperçue que certains travailleurs signaient les cartes pour obtenir 40%, elle n'a pas renouvelé leurs contrats », a déclaré M. Pilozo.

Lorsque l'intimidation, la diffusion de fausses informations et les représailles contre les travailleurs ont échoué, la direction de Walmart a tenté d'apaiser les travailleurs en leur offrant des avantages.

« Ce n'est que cette année qu'on a commencé à recevoir des barbecues et de la crème glacée gratuite. Ils nous demandaient: 'Comment puis-je vous aider?' 'Avez-vous besoin de plus d'heures?' Ils ont même installé un divan pour que les gens puissent s'asseoir et se détendre, et une machine pour jouer à des jeux vidéo dans la cafétéria. Je me demande si on va encore avoir des barbecues et de la crème glacée gratuite après tout ça ».

Le vote en faveur de la formation d'un syndicat avec Unifor sera certifié par la Commission des relations de travail de l'Ontario avant que les travailleurs puissent élire un comité de négociation. Walmart pourrait tenter de s'opposer à l'accréditation, comme elle l'a fait par le passé lorsque ses travailleurs ont tenté de se syndiquer.

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