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Quelques semaines plus tard

Que retenir de la grève de la fonction publique?

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Près de deux ans après l'expiration de leur convention collective, les employés représentés par l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) ont récemment conclu une des plus importante grève de l'histoire du Canada, mobilisant plus de 123 000 travailleurs de presque toutes les organisations fédérales. L'Étoile du Nord propose un retour sur un conflit qui a marqué l'actualité des dernières semaines.

La grève a mis de l'avant la préoccupation majeure des travailleurs face à l'explosion du coût de la vie. Avec une inflation supérieure à 13% depuis la fin de leur convention collective, l'augmentation initialement proposée par l'employeur de 2,25% par année aurait été insuffisante pour maintenir leur pouvoir d'achat. Samir, un gréviste rencontré sur une ligne de piquetage en fin avril, exprimait son mécontentement à l'Étoile du Nord en soulignant que "nous ne demandons pas d'augmenter notre salaire... Nous demandons simplement de faire face à l'inflation. C'est tout."

"Je sais que le gouvernement ne va pas s’occuper de l’inflation parce qu’il n’en reconnaît pas la raison," explique Samir. "Regardez les statistiques sur les profits du gouvernement, des fabricants de produits alimentaires ou des sociétés pétrolières et gazières... c’est en centaines de pour cent. C’est ce qui cause de l’inflation. Ils utilisent la situation COVID pour augmenter les prix."

À défaut de politiques généralisées qui aideraient le public à faire face à l'inflation, les grévistes ont réussi à obtenir, dans l'accord de principe du 1er mai, une augmentation de l'échelle salariale qui commencerait à "combler l'écart par rapport à l'inflation", comme l'indique la déclaration de l'AFPC. La nouvelle échelle salariale permettra à de nombreux travailleurs et travailleuses de l'AFPC de bénéficier d'une augmentation de 12,6 % au cours des trois années de sa durée, ce qui, dépendant de la source, correspondrait presque à l'inflation des trois dernières années.

Au-delà des revendications salariales, les travailleurs se sont interrogés sur les priorités financières du gouvernement. Ils ont souligné les dépenses croissantes pour les consultants et les entrepreneurs, tandis que les employés à temps plein et expérimentés étaient négligés. Tom, un membre en grève de l’AFPC, s'exclamait que: "Vous allez dépenser ici, là, partout, mais quand il s’agit de notre convention collective, l’argent se tarit soudainement? Et je pense pas qu’en ce qui concerne les augmentations de salaire [des députés], ça prenne autant de temps..."

Ainsi, l’une des concessions remportées par l’AFPC dans l’entente de principe met un frein à la tendance croissante à sous-traiter les travaux à des entrepreneurs ou à des consultants du secteur privé les moins soumissionnaires. Les fonctionnaires seront désormais protégés contre les mises à pied s’ils sont en mesure d’effectuer le même travail qu’un entrepreneur dont les services ont été retenus au moment de la mise à pied.

Malgré cela, un autre enjeu retenait aussi l'attention. Le télétravail, maintenant considéré par beaucoup comme partie intégrante de la vie de bureau, s'est révélé extrèmement contentieux alors que le gouvernement demandait le retour en présentiel dans un court délais. Selon Asif, un travailleur en grève interrogé par l'Étoile du Nord, le syndicat ne s'opposait pas à revenir au moins partiellement sur place. "Ce que le syndicat veut, c'est que cela figure dans la convention collective et qu'il sache pourquoi."

De nombreux travailleurs partageaient cet avis et remettent en question la nécessité de travailler au bureau lorsqu'ils peuvent être tout aussi productifs depuis leur domicile. De même, ils mettaient en avant le fait qu'ils avaient mis beaucoup d'efforts pour s'adapter à cette nouvelle situation, et qu'un retour complet au bureau augmenterait fortement leurs dépenses, déjà trop hautes avec l'inflation.

Des mots d’encouragement et de solidarité pour tous ceux qui les regardaient ont été partagés par tous les grévistes de l’AFPC interviewés pendant qu'ils étaient toujours en grève. Assan sympathisait avec les travailleurs non syndiqués et les a exhortés à considérer cette lutte comme un exemple de ce que le travail organisé peut accomplir: "Nous sommes des travailleurs qualifiés, s’ils peuvent nous traiter comme ça, alors je ne peux qu’imaginer comment ils traitent les autres travailleurs. Donc, [vous] devriez entrer dans un syndicat. [Ce n’est pas] un monde parfait... Si vous n’êtes pas plus fort, pour protester, alors quelqu’un va vous réprimer."

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