Postes Canada est paralysée, ses travailleurs exigent une nouvelle vision

Depuis 0h01 aujourd'hui, Postes Canada est complètement à l'arrêt. Son PDG, Doug Ettinger, a forcé les travailleurs postaux à entrer en grève après avoir ignoré leurs revendications. Il les a également menacés de renvois massifs et d'une dégradation de leurs conditions de travail. Le nœud du problème est la situation financière de la société d'État: l'industrie de la poste a considérablement évolué au cours des 20 dernières années et le budget de Postes Canada a été durement touché.

De plus en plus de colis et de moins en moins de lettres sont livrées, partout au pays. De plus, Postes Canada doit faire face à des concurrents qui semblent en constante expansion, comme Amazon. Cependant, les postiers ne sont pas en grève uniquement pour eux-mêmes. Ils veulent s'engager envers la corporation et la consolider pour qu'elle devienne le meilleur service possible pour le public. Ils proposent de nouveaux services à leurs communautés dans le cadre de la campagne « Vers des collectivités durables ».

L'initiative suggère une expansion des services offerts par Postes Canada comme moyen d'augmenter les revenus et de s'adapter à l'évolution du marché. Les propositions comprennent:

• des services bancaires postaux,
• des visites aux aînés,
• de l'Internet haute vitesse,
• des livraisons de nourriture à des prix abordables,
• la recharge des véhicules électriques, et
• des centres communautaires.

Doug Kellam, un délégué syndical du Syndicat des Travailleurs et Travailleuses des Postes (STTP) qui travaille à Postes Canada depuis sept ans, a déclaré à l'Étoile du Nord que cette campagne propose de « remodeler [Postes Canada] pour qu'elle soit au service des collectivités canadiennes, et pour cela, il faudrait vraiment consulter nos communautés et répondre à leurs besoins. C'est pourquoi des choses comme les services bancaires postaux et les centres communautaires sont extrêmement importantes. »

Ils proposent également de moderniser leur flotte avec des véhicules électriques fabriqués par des travailleurs syndiqués, d'équiper les bureaux de poste avec des panneaux solaires, et d'étendre l'utilisation des véhicules de Postes Canada pour la livraison sur le dernier kilomètre. Cela permettrait de réduire les embouteillages et la pollution et de diminuer l'utilisation de véhicules qui ne sont pas remplis au maximum de leur capacité.

L'initiative « Vers des collectivités durables » est née d'une campagne antérieure du STTP, « Sauvons Postes Canada ». Cette initiative a été lancée sous le gouvernement Harper en réponse à la réduction généralisée des effectifs causée par le basculement des lettres vers les courriels et par l'augmentation incessante des transactions financières en ligne.

M. Kellam explique qu'« au cours des 15 ou 20 dernières années, l'avènement d'Internet et le passage à la conduite des affaires, à la communication personnelle et à toutes ces choses en ligne » ont entraîné une perte de revenus.

« Pendant la majeure partie de son existence, Postes Canada a eu le monopole du courrier » et durant la majeure partie de l'existence du service de courrier, ce dernier « a plus que payé pour les services fournis par Postes Canada ».

L'une des mesures de réduction des effectifs consistait à « se débarrasser de la livraison à domicile pour rendre le service plus efficace », explique M. Kellam, « ce qui s'est traduit par l'idée de créer des boîtes aux lettres communautaires ».

Le gouvernement fédéral a également privatisé les bureaux de poste de première ligne, en sous-traitant le service à des sociétés telles que London Drugs, propriété du milliardaire britanno-colombien Brandt Louie, et Shoppers Drug Mart, propriété de la famille milliardaire Weston.

La campagne « Sauvons Postes Canada » a été largement couronnée de succès, car elle a permis de maintenir la distribution en porte-à-porte et de mettre un terme à la vente des actifs.

Actuellement, les travailleurs de Postes Canada sont confrontés à de nouveaux défis imposés par leur employeur, qu'ils espèrent relever dans le cadre des négociations en cours.

Par exemple, la société d'état embauche pour un nouveau poste de tri des lettres afin de, supposément, permettre la distribution d'un plus grand nombre de lettres et de colis. Les facteurs comme M. Kellam affirment que ce système n'est pas plus efficace que le système de valeur temporelle utilisé en ce moment, qui divise la journée de travail en périodes prédéterminées pour la livraison, le tri et le ramassage.

« En fin de compte, il s'agit d'une demi-mesure pour essayer de rendre les choses plus efficaces », déclare M. Kellam. « Ce qui finit par se passer, c'est que les facteurs doivent prendre le courrier qui a été trié par les routeurs, puis ils doivent le regrouper avec les autres types de courrier dans leurs camions », ce qui rend le tri initial redondant.

Ce nouveau système de tri du courrier oblige les facteurs à transporter plus de courrier sur des itinéraires plus longs. La combinaison de ces deux facteurs augmentera probablement la fatigue physique et mentale des travailleurs, puisque Postes Canada cherche à supprimer les congés pour cause de stress.

Alors que le syndicat préconise des solutions axées sur la collectivité pour faire face aux multinationales de la livraison de colis et au commerce électronique, qui occupent des parts de plus en plus importantes du marché, les politiciens sont largement favorables à ce que la société d'État soit dévorée par la privatisation. Les conflits de travail à Postes Canada ont une longue histoire de retour au travail par voie législative, quatre grèves depuis 1987 ayant fait l'objet d'ordonnances de retour au travail.

Depuis le mois d'août, la grève ferroviaire des Teamsters et la récente grève des dockers ont fait l'objet d'ordonnances de reprise du travail.