« On fait juste pelleter par en avant »

Incertitude pour les employés de soutien d’un Cégep sous-financé

Bâtiments délabrés, et services aux étudiants qui se détériorent, administration qui puise dans les fonds d’urgence pour continuer à fonctionner : le Cégep de Saint-Laurent est en train de s’effondrer à plus d’un titre. Son personnel de soutien s’inquiète de ce que l’avenir lui réserve.

« On est dans un Cégep qui s’effondre, donc s’il y a une promesse et une certitude que je peux vous donner aujourd’hui, c’est que nous allons avoir besoin de fonds d’urgence », déclare Jess Corteau, responsable de la mobilisation pour le syndicat des travailleurs de soutien du Cégep de Saint-Laurent.

L’Étoile du Nord s’est entretenue avec M. Corteau pour discuter des difficultés croissantes auxquelles sont confrontés les travailleurs et les étudiants. Le Cégep compte plus de 100 travailleurs de soutien, dont les postes comprennent l’entretien, les techniciens de cours, le personnel de soutien à l’apprentissage adapté et des travailleurs spécialisés comme des plombiers et des électriciens.

« Pour l’instant, nous, on n’a pas vécu les coupures, parce que comme plusieurs cégeps, on avait ce qu’on appelle un solde de fonds, qui est généralement ce qu’on se garde pour les urgences », déclare M. Corteau.  

« Mais on est en train de les dépenser parce que, pour l’instant, le Cégep a fait le choix de conserver tout le personnel. Mais on sait que c’est temporaire. On est très conscient qu’on fait juste pelleter par en avant. » 

Selon M. Corteau, leurs emplois sont beaucoup moins protégés que ceux des professeurs ou des professionnels. En raison de leur nombre relativement élevé et de la faible visibilité de leur travail, ils sont particulièrement vulnérables aux coupures de personnel et de services.

« Tant et aussi longtemps qu’il y a un certain nombre d’élèves, on peut pas couper dans les profs, les autres. C’est conventionné. Il doit avoir un maximum d’élèves par classe. Ils sont très bien protégés. C’est malheureusement pas le cas pour les employés de soutien. Il y a pas de règles qui disent que, en haut de 3 000 étudiants, ça prend un certain nombre de gens qui font du ménage. »

Les étudiants du Cégep de Saint-Laurent manifestent contre les .

Les récentes décisions de la CAQ n’ont fait qu’aggraver les problèmes croissants auxquels est confronté l’enseignement supérieur au Québec. En novembre 2024, la CAQ a instauré un gel des embauches pour le personnel « administratif », une catégorie large qui comprend de nombreux travailleurs de soutien, ce qui a laissé des postes essentiels vacants. 

En mars 2025, le gouvernement a annoncé des coupes budgétaires de 151 millions de dollars pour tous les cégeps. Ces politiques incitent à poursuivre la et l’externalisation dans le secteur public.

« Est-ce que ça va être des mises à pied ou des coupures de service? Est-ce qu’on va réduire les heures de bibliothèque, comme on a fait ailleurs dans les autres cégeps? C’est les inquiétudes qui nous traversent. On est très inquiets par les coupes de personnel et la sous-traitance. »

« Presque tout l »entretien de soir est fait par une compagnie externe et on voit les problèmes que ça cause. On a de la misère à communiquer. Ces compagnies-là ne traitent pas leurs employés extraordinairement bien donc forcément le travail va avec, c’est bien normal. »

Bien que les postes de soutien n’aient pas été supprimés jusqu’à présent, M. Corteau voit où le cégep se dirige si la politique ne change pas.

« Même si c’est des services extrêmement pertinents et utiles, quand vient le temps de balancer le budget, il n’y aura plus de questionnements sur est-ce que c’est un service aux étudiants ou quoi que ce soit. Les précaires vont s’en aller en premier. Et après ça, je m’attends à ce qu’on parle de restructurations, réorganisation—toute la poutine administrative qui va nous rendre extrêmement vulnérables. » 

« On le voit déjà, j’ai des gens qui tombent en maladie pour des raisons d’ presque chaque semaine. […] Là, j’ai des gens qui remplacent des remplaçants. On est à 2-3 degrés de remplacement des fois. C’est complètement absurde. »

Et, comme nous le constatons dans la tendance générale à l’ pour la population, il y a toujours des ressources pour ceux qui sont au sommet.

« Par contre, [les administrateurs], il n’en manque pas. Des cadres, il y en a partout. Des directeurs, il y en a toujours plus. On ne voit pas de couple de ce côté-là. Il n’y a pas de gel d’embauche du côté des cadres. »

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