Bilan de l’année

2025 au Québec—privatisations, coupures et lutte de classe

Cette année, le gouvernement caquiste de François Legault a continué sa croisade en faveur de la classe dominante à une vitesse accélérée. Que ce soit par des lois contre les locataires, une vie plus coûteuse pour les travailleurs, des coupures dans les , de mauvais investissements ou même en mettant en péril la santé des citoyens, la CAQ est présente sur tous les fronts.

Le résultat des « top guns du privé » au volant du système de santé

Le secteur public québécois a connu une nouvelle détérioration de l’efficacité et de l’accessibilité des services. Même si le mandat de la CAQ reposait sur la diminution des coûts bureaucratiques et l’amélioration de « l’efficacité et la flexibilité » des services, il s’oriente clairement vers une progressive de la santé, de l’éducation et des transports en commun.

Les conséquences des réformes de Santé Québec se sont fait sentir rapidement. Un an après la centralisation des institutions régionales de santé en une seule organisation sous l’autorité de l’ancienne PDG d’une compagnie de santé privée, aucun des objectifs prétendus du gouvernement visant à améliorer les services n’a été atteint.

La liste de décisions désastreuses est longue—gels d’embauches, sous-traitance dans les rénovations et l’entretien menant à une explosion des coûts, coupures dans les services, surcharge de travail et de tâches administratives par les travailleurs sur le terrain, ainsi l’ajout de 200 hauts dirigeants grassement payés, gonflant une déjà absurdement complexe.

Des écoles en ruine

La situation en l’éducation ne va pas mieux. Le gouvernement a coupé des centaines de millions de dollars des budgets des cégeps en 2025. Bernard Drainville, ministre de l’Éducation avant le remaniement ministériel de septembre, a démontré sa déconnexion de la réalité du terrain en demandant aux travailleurs d’éviter d’affecter les services directs aux étudiants.

Un an plus tard, l’impossibilité de répondre à cette demande est évidente. Par exemple, au cégep Saint-Laurent, à Montréal, les déficits d’entretien s’élèvent à 20 millions de dollars, et plus de la moitié de ses édifices sont considérés en mauvais état. Ils ont dû fermer un pavillon et louer des locaux dans un bâtiment deux kilomètres plus loin.

La STM et la « prise en otage de la population »

Les coupures, la privatisation et le recours à la sous-traitance se sont aussi fait ressentir chez les travailleurs de la Société de transport de Montréal (STM). Plusieurs grèves ont eu lieu en 2025 pour l’amélioration de leurs conditions de travail stagnantes depuis des années, mais également contre la privatisation et la mauvaise gestion de l’entreprise de transport publique.

Au début de l’année, la STM avait annoncé que l’entièreté des services de transport adapté livré par minibus serait confiée à des transporteurs privés depuis 2026, malgré une hausse des déplacements dans les dernières années et un niveau de satisfaction de la clientèle élevé.

Les travailleurs constatent une forte augmentation des recours aux entreprises externes, malgré que la main-d’œuvre existe déjà à l’interne. Tout comme en santé et en éducation, le recours à la sous-traitance a fait exploser les coûts.

La grande patronne de la STM, Marie-Claude Léonard, a eu une augmentation de 6,5% entre 2023 et 2024, avec un salaire d’environ 475 000 dollars l’an dernier. Or, selon son rapport annuel de 2024, la société a équilibré son budget grâce à 36 millions de dollars en optimisation, une réduction des dépenses de 15 M$ par rapport au budget initial et 14 M$ de plus que prévu en revenus commerciaux.

Malgré tout cela, la STM, de concert avec les grands médias, accusait les travailleurs en grève de « prendre en otage la population », imputant la crise financière de l’entreprise à leurs salaires. Cette affirmation est basée sur un rapport controversé de la compagnie Raymond Chabot Grant Thornton qui recommandant essentiellement la privatisation du réseau de transports en commun. 

Le ministre du Travail Jean Boulet a menacé une loi spéciale et a déposé un projet de loi écrasant la capacité de grève des travailleurs.

Syndicalisation, grève et luttes des classes

Les grands patrons du secteur privé, de leur côté, baignent dans un climat de liberté totale. Dès janvier, Amazon a décidé de fermer tous les entrepôts du Québec en réponse directe à la syndicalisation d’un entrepôt de Laval en 2024. 4500 personnes perdent leur emploi en hiver 2025. 

Malgré un mouvement de boycottage de la part de la population du Québec, la réponse du gouvernement a été claire: il n’a aucun problème à ce qu’une multinationale américaine attaque directement la classe ouvrière du Canada.

En août, les agents de bord d’Air Canada ont déclenché une grève après avoir rejeté une offre qu’ils dénonçaient comme étant une réduction de salaire déguisée en plus de maintenir la moyenne de 35 heures par semaine non rémunérées. Air Canada a aussitôt répondu par un avis de lock-out. 

Seulement quelques jours plus tard, avec l’appui de représentants de la classe patronale canadienne, Ottawa demande au Conseil canadien des relations industrielles de mettre fin à la grève avec une loi spéciale et d’imposer un contrat de travail. En réponse, les agents de bord ont défié l’ordre de retour au travail, et une entente de principe a été négociée quelques heures plus tard. 

Dans le secteur public, en plus des salaires stagnants face à l’inflation, une des plus grandes revendications a été de mettre fin à la privatisation des services et au recours à la sous-traitance. 

En 2025, Postes Canada et les Cols bleus de la ville de ont été sans convention collective pendant plusieurs mois, voire des années. Un refus de négocier de la part de l’employeur et des menaces de privatisation ont poussé les deux syndicats à unir leurs forces durant une manifestation de solidarité. 

Les syndicats dénoncent l’explosion des coûts que la sous-traitance entraînerait à long terme, surtout dans le contexte d’un service déjà affaibli.

Se loger devient un luxe

Au Québec, la a été particulièrement difficile en 2025. Selon Statistique Canada, les loyers moyens à Montréal ont augmenté de 71%, ou 800$, depuis 2019. La ministre de l’Habitation jusqu’en septembre, France-Élaine Duranceau, a introduit une réforme du calcul de l’augmentation des loyers qui suit l’inflation moyenne des trois dernières années. Cette réforme est pratiquement identique à la proposition qu’avait faite le plus grand lobby des propriétaires immobiliers du Québec, la CORPIQ.

Selon Statistique Canada, l’itinérance a énormément augmenté depuis les dernières années. De 2018 à 2024, l’énumération des personnes en situation d’itinérance dans les lieux extérieurs a quadruplé. 

Les campements à travers plusieurs parcs ont explosé. Les démantèlements violents des campements de personnes en situation d’itinérance sont aussi de plus en plus fréquents.

Suivant un discours familier, la CAQ et l’Association patronale APCHQ ont accusé les travailleurs en grève de la construction résidentielle de gagner trop cher et que leurs demandes d’augmentation salariale auraient fait augmenter les prix des maisons d’environ 55 000 dollars. Pourtant, depuis 2020, le prix d’une maison individuelle a augmenté de 73%, mais le salaire des travailleurs a seulement augmenté de 8,2% depuis 2021.

Même des projets de construction immobilière ont fait sourciller les organisations de défense des locataires et risquent plutôt d’aggraver la crise du logement pour la classe ouvrière. 

Un exemple flagrant est le projet des promoteurs immobiliers du groupe Montoni, dans le quartier Molson. Ils veulent y construire des bureaux, des commerces, un hôtel et des immeubles résidentiels sur le site de l’ancienne brasserie dans le quartier Ville-Marie, le quartier le plus pauvre de l’île. Un ménage sur cinq doit consacrer 80% de ses revenus pour s’y loger. 

Le plan n’inclut pas d’école, de garderie, ni de services communautaires. Le Centre de services scolaires de Montréal a évincé huit organismes communautaires (garderie, banque alimentaire, le Comité BAILS) d’un de ses bâtiments pour en reprendre les locaux.

Attaque directe contre le peuple

Une des tendances qui reviennent régulièrement depuis le début du mandat de la CAQ, c’est les attaques directes contre le pouvoir d’intervention de la population en politique et des institutions démocratiques telles que les syndicats.

Un grand exemple, c’est l’expansion de l’usine Stablex, à Blainville. Un mouvement citoyen démontre les risques sur la santé de la population, le BAPE a publié un rapport désastreux au niveau environnemental, et plusieurs organisations communautaires et scientifiques décrivent la tourbière de Blainville comme un milieu à protéger. 

Malgré tout cela, le gouvernement du Québec a laissé la compagnie américaine exploiter le terrain comme ils le veulent en adoptant une loi sous bâillon au beau milieu de la nuit.

En région, les blocages autochtones se sont également multipliés. Puisque le gouvernement n’a pas agi pour résoudre les conflits entre les entreprises forestières et les communautés qui y vivent, des défenseurs de la forêt ont bloqué le passage aux camionneurs forestiers pendant plusieurs jours pour empêcher la déforestation sur leur propre territoire.

Un autre exemple flagrant de la préférence pour le patronat par la CAQ est les attaques contre le droit de grève et les syndicats. En février 2025, Jean Boulet, ministre du Travail, dépose le projet de loi 89. Cette loi donne le droit au gouvernement de forcer le retour au travail dans des secteurs qui sont considérés comme non essentiels, que ce soit au privé ou au public.

Suite à la grève de la STM en automne 2025, Jean Boulet passe à l’attaque une nouvelle fois et dépose le projet de loi 3. Cette réforme vise directement la liberté des syndicats de contester des lois en cours, coupe massivement dans leur financement et ajoute une couche de bureaucratie par les nouvelles procédures administratives que cette réforme engendre. 

Durant les audiences publiques sur le projet de loi, plusieurs groupes de lobbying du patronat ont été reçus. Cette réforme a mené à une manifestation intersyndicale d’environ 50 000 personnes dans les rues du centre-ville de Montréal.

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