Des syndicats et des organisations ouvrières ont confronté hier le ministre du Travail du Québec, Jean Boulet, lors de l'inauguration d'un projet de construction à Trois-Rivières. Il fait l'objet de vives critiques depuis le dépôt du projet de loi 89, qui accroîtrait considérablement le pouvoir du gouvernement d'empêcher des grèves.
La manifestation de vendredi matin est au moins la troisième action majeure contre le ministre du Travail depuis l'annonce de sa loi répressive fin février. Quelques jours après, le caucus de la construction de l’Alliance Ouvrière avait organisé une manifestation devant le bureau du Conseil consultatif du travail et de la main-d'œuvre pour dénoncer la loi.
La semaine dernière, des manifestants ont réussi à empêcher le ministre caquiste de prendre la parole devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Une trentaine de militants avaient infiltré l'événement pour le perturber, tandis que des centaines d’autres se sont heurtés à la police à l’extérieur, tentant d’entrer. Une vitre a été brisée et la brigade antiémeute est arrivée après plus d’une heure de tension.
Enfin, hier matin, le ministre a ressenti la pression d'une centaine de manifestants. Ceux-ci ont tenté de ralentir son arrivée, mais M. Boulet est entré, escorté par un cortège policier, sans même jeter un regard vers les syndicalistes.
À sa sortie, des militants ont contourné le barrage policier et bloqué brièvement son départ. La situation s'est échauffée lorsque des agents du Service de police de Trois-Rivières ont menacé et poussé les manifestants. Le chauffeur de la voiture de service, avec le ministre à l’arrière, a ensuite pris la fuite à toute vitesse.

Projet de loi hors du commun, réponse hors du commun
Le projet de loi 89 donnerait au gouvernement du Québec le pouvoir d'arrêter toute grève menaçant « la sécurité sociale, économique ou environnementale » de la population, sans en préciser les critères. Le ministre pourrait aussi forcer les grévistes à maintenir les services « assurant le bien-être de la population ». Enfin, il aurait la possibilité d’imposer une convention collective par arbitrage, sans passer par des négociations.
Les syndicats critiquent le projet de loi, jugeant la notion de « sécurité de la population » trop vague, ce qui pourrait permettre au ministre de stopper presque toutes les grèves, au bénéfice du patronat et de l'oligarchie. Magalie Picard, présidente de la FTQ, a exhorté les militants à « traquer » le ministre, affirmant qu'il ne devrait pas être tranquille tant que la loi n’est pas retirée.
Les mesures anti-travailleurs de la CAQ ont fortement affecté sa popularité. En automne 2023, la grève de centaines de milliers de travailleurs du secteur public a fait chuter sa cote, qui ne s'est pas relevée depuis. Selon le site de projection électorale Qc125, la CAQ pourrait perdre 72 de ses 86 sièges lors des prochaines élections.
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