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Postes Canada se dit menacée par une grave crise financière. La société avertit qu'elle pourrait manquer des fonds nécessaires à son fonctionnement et à ses réserves d'ici 2025, à moins qu'elle n'emprunte davantage d'argent ou qu'elle ne refinance sa dette. Mais les travailleurs affirment que cette déclaration de la société d'État est trompeuse et ne tient pas compte de la mauvaise gestion flagrante des finances de la société.
« J'ai vécu plusieurs de ces arrêts de travail-là », déclare Tim Ashworth, président de la section locale 566 du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP), qui représente environ 180 employés à Kingston, en Ontario. « Chaque fois que on se présente à la table [de négociation], Postes Canada a l'air de perdre beaucoup d'argent et se lamente. Elle dit qu'elle est pauvre et elle veut faire porter le chapeau aux travailleurs. »
Tim a travaillé pour Postes Canada pendant plus de 30 ans et a été le témoin direct de la façon dont la société s'est enfoncée dans une crise financière. « On pense que cette perte de fonds est le résultat direct d'une mauvaise gestion », déclare Tim. « Et on pense que les travailleurs ne doivent payer pour ça. »
Durant la pandémie de la Covid-19, Postes Canada a augmenté ses livraisons de colis. Les travailleurs de Postes Canada ont également accepté de prolonger leurs contrats de deux ans, avec seulement 2% d'augmentation salariale par an, afin de servir les Canadiens en période de crise.
En réponse à l'augmentation des livraisons, Postes Canada a alloué 4 milliards de dollars à la modernisation de son infrastructure. Sans surprise, le nombre de colis a cessé d'augmenter à mesure que la pandémie ralentissait. Au lieu d'adapter son plan sur cinq ans à cette nouvelle réalité, Postes Canada a continué à dépenser trop d'argent pour des changements d'infrastructure inutiles. Avec quatre milliards de dollars répartis sur cinq ans, Postes Canada consacrait chaque année 800 millions de dollars à des dépenses non liées au travail. Ce n'est pas une coïncidence, disent les travailleurs, si Postes Canada affirme avoir perdu 748 millions de dollars en 2023.
Postes Canada investit dans une « innovation malavisée »
Tim Ashworth a déclaré à l'Étoile du Nord que les changements d'infrastructure que Postes Canada tente de mettre en œuvre sont « mal orientés » et ne reflètent pas les besoins des travailleurs ou des Canadiens.
« [Les cadres supérieurs] ne viennent pas nous voir pour trouver des solutions. Ils inventent leurs propres solutions et, la plupart du temps, elles ne sont pas adaptées à notre travail », déclare Tim.
Il a donné à l'Étoile du Nord des exemples du type de choses pour lesquelles Postes Canada a dépensé de l'argent.
« Entre autres, j'ai vu un projet de bras robotisé à l'intérieur des principaux centres de tri, qui prendrait une lettre, la lirait et la mettrait dans le bon trou. Nous, on pense qu'on peut le faire. C'est pas nécessaire de dépenser des centaines de millions de dollars en robots pour y parvenir. »
« Ils travaillent aussi pour faire des boîtes à relais robotisées. Les boîtes à relais, c'est les boîtes que tu vois au coin de la rue et dans lesquelles on prend le courrier. Ils sont en train de les mettre sur des roues avec toutes sortes de capteurs d'intelligence artificielle pour nous suivre dans les rues, pour qu'on puisse retirer notre courrier au fur et à mesure. Nous, on pense que c'est un gaspillage d'argent ridicule. Le travail se fait déjà. C'est une modernisation inutile de l'équipement. »
Tim a expliqué que Postes Canada a mis en service des nouveaux camions plus grands dans tout le pays afin de moderniser la flotte de véhicules de l'entreprise. Cependant, chaque nouveau camion coûte 100 000$. Les travailleurs disent qu'ils peuvent se contenter des anciens camions et que les nouveaux camions sont « un gaspillage d'argent. »
Les employés de Postes Canada veulent que l'entreprise se concentre sur les travailleurs et non sur les robots. Au lieu de gaspiller de l'argent dans des équipements ou des technologies coûteuses qui pourraient supprimer des emplois, ils demandent de meilleures conditions de travail. Ils réclament notamment des salaires équitables correspondant à l'augmentation du coût de la vie, des avantages sociaux plus importants, une plus grande sécurité d'emploi pour les travailleurs temporaires et des protections contre les changements technologiques néfastes.
Mais les travailleurs ne demandent pas seulement de meilleures conditions de travail. Ils pensent que l'entreprise peut être sauvée de sa crise financière si elle adopte les solutions proposées par les travailleurs. La campagne « Vers des collectivités durables » permettrait d'étendre les services essentiels offerts par Postes Canada, tels que les services bancaires postaux, l'enregistrement des personnes âgées, la livraison de nourriture et l'internet à haute vitesse, ce qui serait particulièrement bénéfique dans les zones rurales du pays.
Les cadres supérieurs de Postes Canada doivent rendre des comptes
Tandis que les employés de Postes Canada sont confrontés à des taux d'accidents du travail parmi les plus élevés au Canada, les cadres supérieurs se récompensent en s'accordant eux-mêmes une prime annuelle appelée « prime de risque ».
« Ils se donnent des primes parce qu'ils se mettent eux-mêmes en risque, mais ce sont nos travailleurs qui sont vraiment en danger. C'est nous qui sommes dehors », explique Tim. « Parfois, on nous dit qu'on doit rester dehors après la tombée de la nuit pour distribuer le courrier, souvent au beau milieu de l'hiver. Parfois, dans les zones rurales, les travailleurs n'ont même pas accès à un cellulaire en cas d'urgence. Nous voulons de meilleures normes pour ces employés, et nous voulons qu'ils aient une meilleure protection. Nous voulons que Postes Canada reconnaisse la valeur de ses travailleurs. »
Les travailleurs estiment qu'ils ne devraient pas être punis pour la mauvaise gestion financière des cadres supérieurs, qui continuent de se récompenser avec des salaires énormes tout en négligeant les besoins des travailleurs et des Canadiens.
« Nous devrions être une entreprise rentable. Nous transportons la majorité des colis et du courrier des Canadiens d'un bout à l'autre du pays », déclare Tim. « Les cadres supérieurs actuels de Postes Canada devraient être examinés à la loupe et être obligés d'expliquer pourquoi l'entreprise perd autant d'argent. »
À la question de savoir si Postes Canada est à l'écoute des revendications des travailleurs pendant la grève, Tim a répondu qu'il ne croyait pas que la société négociait de bonne foi, compte tenu des antécédents du gouvernement qui a forcé le retour au travail des travailleurs lors de grèves dans le passé. Les travailleurs s'inquiètent du fait que Postes Canada se traîne les pieds, attendant l'action du gouvernement et une loi de retour au travail avant les vacances de Noël.
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