L'Étoile du Nord

Des votes de grève chez Cargill

Des travailleurs ne peuvent pas s’acheter la viande qu’ils transforment

Temps de lecture:3 Minutes

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Près de 1 000 travailleurs de l'usine de transformation du bœuf Cargill Dunlop à Guelph, en Ontario, sont en grève depuis plus de deux semaines. Selon ceux-ci, le géant de l'agroalimentaire d'une valeur de plusieurs milliards de dollars ne les paye pas suffisamment pour faire face aux augmentations du coût de la vie.

Les travailleurs de cette usine (la plus grande de ce type en Ontario), représentés par la section locale 175 des Travailleurs Unis de l'Alimentation et du Commerce (TUAC), ont voté à 99 % en faveur de la grève. Ils travaillent sans convention collective depuis janvier, ayant déjà rejeté une offre de Cargill en mai par 82%.

Lundi, les travailleurs de l'usine Case Ready de Cargill, près de Calgary, ont également voté à 100 % en faveur de la grève si aucun accord contractuel n'est conclu. Les votes de grève à l'unanimité sont rares pour les grandes unités de négociation.

« En tant qu'une des plus grandes entreprises privées du monde et un géant de l'agroalimentaire qui a affiché un chiffre d'affaires de 177 milliards de dollars en 2023, Cargill peut certainement se permettre de faire ce qu'il faut », déclarait Thomas Hesse, président de la section locale 401 des TUAC, qui représente les travailleurs de l'usine Case Ready.

En effet, Cargill est l'un des plus grands monopoles au monde et la plus grande entreprise privée d'Amérique du Nord. Elle fait partie des quatre multinationales qui, ensemble, contrôlent plus de 70 % du marché mondial des produits agricoles. 

En 2021, la richissime famille Cargill a récolté les bénéfices les plus importants des 159 années d'existence de l'entreprise. Les revenus de l'entreprise ont augmenté de 14,4 milliards de dollars par rapport à 2020, en raison de la hausse des prix des produits agricoles pendant la pandémie de COVID-19.

Au plus fort de la pandémie, l'entreprise a retiré aux travailleurs de l'usine de Guelph une augmentation de salaire de 2,00 dollars par heure pour la COVID. Il s'agit là d'un point de discorde majeur pour les travailleurs de Guelph.

Kelly Tasota, présidente de la section locale 175 des TUAC, expliquait que « la décision de faire grève n'est jamais facile à prendre, mais nos membres ne sont pas satisfaits de ce que l'entreprise a apporté à la table. Nous les soutiendrons jusqu'à ce que le comité de négociation syndicale parvienne à un accord qui reflète la nature de leur travail acharné et leur engagement à créer des produits alimentaires de qualité, qui nourrissent des centaines de milliers de personnes ».

Dans tout cela, le soutien de la communauté a une importance capitale, déclarait également Navidad, capitaine de grève chez Cargill Dunlop. « Beaucoup de syndicats sont venus, les syndicats d'électriciens, le syndicat des travailleurs de l'acier. De petites entreprises comme les pizzerias ont déposé des pizzas, [le café coopératif local] Planet Bean... Le soutien de la communauté a été formidable et, avec le temps, je pense qu'il y aura de plus en plus d'actions de ce type ».

Lors d'un rassemblement, Navidad a déclaré à l'Étoile du Nord que les piquets de grève tenaient bon, malgré l'ensablement des négociations. « Aucune des deux parties ne discute réellement, mais il y a des pressions de toutes parts, en particulier de la part des agriculteurs. Les négociations sont au neutre. »

Cette pression est due au fait que Cargill transforme 80 % du bétail de l'Ontario. Pendant ce temps, les travailleurs de l'usine de transformation du bœuf déclarent ne pas avoir les moyens d'acheter la viande qu'ils transforment.

Susan Rosenthal, organisatrice du rassemblement avec Justice for Workers, estime que la grève pourrait avoir un impact positif pour les travailleurs.

« Si les travailleurs peuvent faire une percée dans n'importe quel secteur de l'économie, en obtenant des salaires plus élevés que l'inflation, cela aura un effet d'entraînement sur tous les autres travailleurs ».

« La grève est un pouvoir. Arrêter le flux des profits, et non seulement arrêter le flux, mais comprendre que l'on a le pouvoir de le faire. La société ne fonctionne pas sans les travailleurs qui, chaque jour, font avancer la société ».

Les négociations doivent se poursuivre les 20 et 21 juin pour l'usine Cargill de Calgary. Le vote de grève à 100 % envoie un message clair: les travailleurs de Calgary sont tout à fait disposés à se joindre à leurs homologues de Guelph pour faire grève si Cargill ne propose pas un contrat équitable dans les semaines à venir.

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