L'Étoile du Nord

Les travailleurs des entrepôts s’expriment

La plupart des travailleurs d’Amazon souffrent de troubles musculo-squelettiques

Temps de lecture:4 Minutes

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Une coalition de travailleurs et de chercheurs a publié un rapport accablant sur les conditions de travail dans les entrepôts d'Amazon dans la région de Montréal. Ce rapport est publié un an après que les travailleurs d'Amazon ont demandé à la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) d'ouvrir une enquête et de procéder à des réformes pour remédier aux conditions de travail dangereuses dans les entrepôts d'Amazon.

La recherche qui sous-tend le rapport a été menée par le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI) et le GIREPS, un groupe universitaire qui étudie les questions relatives au travail, à la pauvreté et à la protection sociale. Le rapport révèle que 60% des travailleurs d'Amazon souffrent de troubles musculo-squelettiques et que 55% d'entre eux ont été témoins ou victimes d'un accident du travail.

Lors d'une conférence de presse tenue le 28 juin, des membres du Comité des travailleurs et travailleuses d'Amazon de Montréal du CTI, de l'Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades de Montréal et plusieurs experts universitaires ont réclamé des améliorations en matière de santé et de sécurité au travail. La conférence de presse s'est tenue devant la CNESST.

Mostafa Henaway, un organisateur du CTI, a expliqué l'historique de la campagne:

« La conférence de presse d'aujourd'hui a lieu un an après que les membres du Comité des travailleurs et travailleuses d'Amazon de Montréal, donc différents travailleurs d'Amazon qui sont actifs et leaders dans le comité, se soient rendus à Québec et aient exigé une rencontre avec le ministre du Travail Jean Boulay pour demander, d'une part, une enquête publique, mais aussi pour exiger une véritable réforme concernant les quotas, les conditions de travail, la façon dont les plaintes des travailleurs d'Amazon sont traitées par la CNESST et pour vraiment dénoncer les conditions. »

En plus de décrier l'inaction du gouvernement, la coalition a dénoncé les exigences élevées d'Amazon en matière de productivité qui, associées à une formation inadéquate et à un manque d'équipement de protection, poussent systématiquement les travailleurs au-delà de leurs limites, les laissant blessés.

Des membres du Comité des travailleurs et travailleuses d'Amazon du CTI manifestent en 2023. Source: Centre des travailleurs et travailleuses immigrants

Benoît, organisateur syndical et ancien travailleur d'Amazon qui s'est blessé au travail, a expliqué à l'Étoile du Nord que les travailleurs d'Amazon, dont beaucoup sont des jeunes et des immigrants récents, sont confrontés à d'importants problèmes bureaucratiques lorsqu'ils tentent de signaler leurs blessures à la CNESST et à la direction d'Amazon.

Il a expliqué les effets à long terme des conditions de travail d'Amazon sur le personnel des entrepôts:

« Éventuellement, beaucoup de monde finissent par quitter Amazon ou être renvoyés parce qu'ils sont plus capables de travailler. Ils n'ont plus d'argent. Ça fait trois semaines que t'es blessé, que t'as absolument aucun suivi médical, aucune reconnaissance de ta blessure. Là, faut que tu trouves une nouvelle job, mais il y a encore blessé. »

« Ça, c'est ce que les statistiques disent pas. C'est ce qui arrive de tous ces collègues-là que j'ai vus qui ont disparu du jour au lendemain sans explication. [...] Ou est ce qu'ils vont trouver une job dans un autre entrepôt? »

Pour M. Henaway, l'inaction du gouvernement en matière de santé et de sécurité dans les entrepôts d'Amazon va au-delà de l'inaction de la CNESST.

« Amazon est l'entreprise qui fait le plus de lobbying. Au cours d'une année, elle a demandé plus de 160 réunions avec différents ministères. Il s'agit en grande partie pour AWS, Amazon Web Services, d'obtenir des contrats gouvernementaux, de faciliter les subventions pour leurs centres de données. ֶ»

« Mais cela va de pair avec la promesse suivante: 'Nous créerons de bons emplois dans nos centres de traitement des commandes si vous nous accordez des allègements fiscaux pour Amazon Web Services, si vous acceptez le contrat ou si vous nous permettez d'ouvrir un centre de données avec de l'hydroélectricité bon marché.' [...] Amazon s'appuie vraiment sur le gouvernement de toutes sortes de façons. [...] Elle négocie évidemment au niveau municipal, au niveau provincial et au niveau fédéral ».

Ces dernières années, les travailleurs d'Amazon de la région de Montréal et d'ailleurs ont fait preuve d'une grande volonté de se syndiquer. M. Henaway pense que cela pourrait avoir un impact important sur les conditions de travail dans les entrepôts du géant du commerce de détail:

« Je pense que la véritable bataille aura lieu lorsque les travailleurs diront: 'Nous ne voulons pas faire 200 colis à l'heure. Nous voulons faire 150 paquets par heure.' [...] Pour l'instant, Amazon ne veut pas négocier avec les travailleurs, n'est-ce pas? [...] Ils ne veulent donc pas renoncer à leur pouvoir, mais en fin de compte, ils sont maintenant obligés de traiter avec les travailleurs. »

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