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Pendant plus de deux semaines, des membres de l'Association des accidentés de la route victimes de la SAAQ (AARVS) ont manifesté devant le siège de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ). Ils sont maintenant partis, mais leur combat n'est pas fini. Christiane Vallière, présidente de l'AARVS, aurait rencontré un député québécois pour faire valoir leurs revendications hier.
Elle dénonce entre autres la société d'assurance publique pour la misère dans laquelle sont plongées les personnes âgées victimes d'accidents.
Christiane a elle-même vécu un grave accident en 2008, où elle a subi une entorse cervicale sévère, entraînant de la dystrophie musculaire. Son bras est resté partiellement paralysé, une situation qui aurait pu être évitée si la SAAQ avait reconnu ses blessures plus tôt.
« J’ai dû vivre cinq ans avec seulement la pension de vieillesse de mon mari, » raconte Christiane. « Quand ils ont enfin reconnu mes blessures, c'était trop tard. Je ne pouvais plus être opérée. Ils m'ont rendue invalide. »
Sa santé a continué de se détériorer avec six infarctus en plus de son invalidité. Ce long combat pour faire valoir ses droits l’a poussée à créer l’AARVS, dans l’espoir de donner une voix à ceux que la SAAQ ignore, comme elle.
Aujourd'hui, Christiane continue de recevoir un montant mensuel de la SAAQ, mais il est voué à diminuer à mesure qu'elle approchera de 68 ans, comme pour beaucoup d'autres accidentés. Elle explique : « Je reçois environ 2100$ par mois après les déductions. Mais à 68 ans, ils vont me couper. »
Promesses non tenues
Depuis des années, Christiane se bat pour améliorer les conditions des aînés accidentés. Avant la dernière réforme, les indemnités des accidentés de plus de 65 ans baissaient de 25% chaque année, jusqu'à disparaître complètement à 68 ans. Ces personnes devaient se contenter de la pension canadienne de base de 1359$, un montant dérisoire.
En 2021, Christiane avait fait une grève de la faim pour tenter de faire bouger les grands patrons de la SAAQ. Le retour avait été positif : on lui avait promis des changements.
Lors d'une rencontre filmée par Christiane et obtenue par l'Étoile du Nord, Alain Généreux, l'attaché politique de François Bonnardel, ministre des Transports à l'époque, avait même affirmé que le projet de loi 22, adoptée en 2022, permettrait aux accidentés de recevoir leur remplacement de salaire de revenu jusqu’à leur décès.
Mais la réalité est bien différente.
Prenons l'exemple d'une personne accidentée à 42 ans, qui gagnait 50000$ par an avant l'accident. Selon les nouvelles règles de la SAAQ, elle recevrait environ 45000$ par an jusqu'à 65 ans pour remplacer son revenu. À 67 ans, ce montant baisse de 75%, soit seulement 11250$ par an.
À 68 ans, une formule complexe est appliquée. Dans le contexte de notre exemple, l’accidenté ne recevrait plus que 244$ par mois. En additionnant ce montant aux prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti, cela fait un total de 1603$.
Ce montant est largement insuffisant en considérant le coût de la vie actuel et se situe 315$ sous le seuil de la pauvreté d'environ 23000$, selon Centraide Montréal. À noter que ce seuil est régulièrement critiqué comme étant trop bas.
La pension de retraite du Régime des rentes du Québec (RRQ) pourrait offrir un certain soutien à cette personne, si elle a suffisamment cotisé selon les critères du RRQ. Cependant, il est peu probable que cela lui permette de dépasser 27000$ par an, soit plus de 6000$ en dessous du seuil minimum pour vivre dignement, selon l'Institut de recherche et d'informations socio-économiques (IRIS).
Des miettes pour l'aide à domicile
En plus des indemnités réduites, l’accès à l’aide à domicile est un autre problème majeur pour Christiane. Elle a beaucoup de difficulté à cuisiner et à faire le ménage en raison de ses blessures. « Mon conjoint aussi, c'est un accidenté de la route. Là, il est malade en plus. J'ai demandé de l'aide personnelle et non, ils me donnent juste 67$ par semaine. »
« J’ai dit à la SAAQ: "Trouvez-moi quelqu’un qui acceptera 67$ par semaine et je le prends tout de suite." » À la place, ce sont les amies de Christiane qui doivent venir l'aider pour qu'elle puisse fonctionner au quotidien.
« Je leur paye des déjeuners au restaurant, des repas. Je leur paye des petites gâteries, parce que je ne veux pas perdre mes amis quand même. » Pourtant, la SAAQ lui a demandé de tout de même faire une déclaration officielle qui confirme qu'elle verse bien un salaire pour de l'aide à domicile.
« Non, elles ne reçoivent pas l'argent ! », s'exclame Christiane. « Je ne peux pas faire ça. » Elle a donc écrit une lettre officielle à la société d'État, dénonçant qu'on lui demandait de faire de fausses déclarations. Ce n'est qu'après ces menaces qu'ils auraient accepté de lui garantir ces 67$ par semaine.
La nouvelle loi, selon ce qu'affirmait le gouvernement, aurait dû bonifier ces aides à domicile pour tout le monde. Mais ce sont principalement les blessés dits « catastrophiques » qui ont finalement été touchés par ces améliorations. Christiane explique par contre que ces blessés sont peu nombreux : parmi les exemples considérés par la SAAQ, on compte les amputés multiples, de même que les grands brulés.
Même si François Bonnardel a promis de corriger une « erreur historique » en assurant un meilleur soutien aux accidentés, les changements du projet de loi 22 suivent la même logique que la réforme de Nathalie Tremblay, PDG de la SAAQ, au début des années 2000. Cette réforme visait à aligner la SAAQ sur le modèle de l'assurance privée, axée sur la notion de « risque », afin de réduire les coûts au maximum.
Lors d'une manifestation l'année passée, l'attaché politique de Geneviève Guilbault, vice-première ministre, avait promis une rencontre avec l'AARVS qui se fait toujours attendre. « Nous sommes fatigués d'attendre, » dit Christiane. « Ils nous ont ignorés pendant un an, mais nous ne lâcherons pas. »
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